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L’engagement média ou l’autre révolution de l’information

Les journaux sont poussés à se réinventer, en Suisse aussi. Par Xavier Comtesse

«Les trois tendances lourdes pour tout média sont la rapidité (vers le temps réel), la brièveté (le plus court possible) et le visuel (d’abord l’écran).»
KEYSTONE
«Les trois tendances lourdes pour tout média sont la rapidité (vers le temps réel), la brièveté (le plus court possible) et le visuel (d’abord l’écran).»
Xavier Comtesse
Manufacture Thinking - Mathématicien et président
05 septembre 2023, 15h00
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Le 30 juin dernier le journal Le Temps a stoppé net l’espace réservé aux blogs citoyens pour des raisons chronophages selon ses dires. Quelques mois auparavant, La Tribune de Genève en avait fait de même.

Que s’est-il passé au pays de Calvin où la tradition voulait que l’on parle à Dieu (de plus en le tutoyant)? Le pouvoir suprême était accessible au peuple, tout de même. Eh bien, c’en est fini. La distance est créée. Pas d’engagement citoyen… ce dernier pouvait éventuellement émettre des avis non conformes à la ligne éditoriale! Cela pose la question de l’engagement média de nos médias.

La Suisse, malgré sa démocratie directe, semble vraiment être pauvre en créativité média. Tournons-nous un instant vers la Californie d’où, depuis plusieurs décennies, nous vient presque toute l’inventivité du secteur dont le fameux concept: «engagement média».

Luc-Olivier Erard, journaliste neuchâtelois qui revient de Californie, où il s’est confronté à la question lors d’un stage au Swissnex, nous précise: «Pour faire simple, trois caractéristiques définissent le concept: créer du contenu collaboratif, interagir avec le public et proposer des appels à l’action. Dans la Bay Area, de nombreuses expériences montrent que l’engagement des audiences se renforce lorsque les médias proposent des» expériences «qui augmentent les» contenus «. C’est le principe» Show, don’t tell «. Quelques exemples: d’abord l’historique, la CraigsList, sorte de site internet (tout de même le 7e site américain par sa fréquentation) avec petites annonces mais doublé de forums communautaires de discussions. Ensuite bien sûr les grands réseaux sociaux comme Twitter (X), Facebook ou LinkedIn, mais aussi Medium, un site dédié aux blogs citoyens. Il s’agit de créer des communautés de lecteurs passionnés, concernés et actifs. Il est possible que ce soit une des clés de la survie économique.»

En Suisse, à l’heure des difficultés financières de nos médias, notamment la RTS qui se lamente déjà de ses futures coupes budgétaires, on s’attend à des changements

Xavier Comtesse

Revenons en Suisse, à l’heure des difficultés financières de nos médias, notamment la RTS qui se lamente déjà de ses futures coupes budgétaires, on s’attend à des changements, peut-être venant du côté de l’intelligence artificielle (IA). En tous les cas, le paysage médiatique doit changer pour survivre. Google l’a bien compris et il a présenté récemment (mi-juillet) un outil IA du nom de Genesis, capable d’écrire des articles d’actualité, à des dirigeants du New York Times, du Washington Post et de News Corp, propriétaire du Wall Street Journal.

Sachant de plus que les trois tendances lourdes pour tout média sont la rapidité (vers le temps réel), la brièveté (le plus court possible) et le visuel (d’abord l’écran), on comprend qu’une révolution média est en court… Elle sera vraisemblablement portée par l’IA.

On verra bientôt des médias genre TikTok-info ou des médias à équipe ultra-réduite ou encore sans papier ni personnel. Plus avancé encore: des IA-bots chercheront et résumeront l’information pour nous, participeront à des forums de discussion à notre place, traiteront les relations commerciales des petites annonces, commanderont les meilleures places de spectacles, etc. Il faut s’imaginer un monde dans lequel les médias seront engagés de manière permanente donc omniprésente (toujours là en tout lieu). En somme, ils auront disparu en tant que tels.