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Le salaire minimum a sa place dans la CCT, pas ailleurs

Inscrire dans la loi le détail des rémunérations serait contreproductif. Par Brenda Duruz-McEvoy

«Lorsqu’il est question d’augmentations salariales, il importe de noter si la CCT prévoit des ajustements des salaires minimaux ou un calcul sur la base des salaires effectifs.»
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«Lorsqu’il est question d’augmentations salariales, il importe de noter si la CCT prévoit des ajustements des salaires minimaux ou un calcul sur la base des salaires effectifs.»
Brenda Duruz-McEvoy
Centre patronal - Responsable politique sociale
01 septembre 2023, 11h00
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Les conventions collectives de travail (CCT) définissent un ensemble de normes minimales pour une branche donnée. Grâce aux négociations entre partenaires sociaux, elles permettent de formuler des règles communes qui protègent, d’une part, les travailleurs concernés et, d’autre part, les entreprises contre la concurrence déloyale. Lorsque les quorums nécessaires sont réunis, elles peuvent être déclarées de force obligatoire et étendre leur effet sur toute une branche, même dans les entreprises qui ne sont pas membres d’une faîtière ou signataires de la convention.

Un élément central de ces conventions est la détermination de salaires minimaux, souvent échelonnés d’après les qualifications des collaborateurs. Ces conventions correspondent à l’expérience du terrain et déterminent des minima réalistes. Il est ainsi possible de prévoir des exceptions aux salaires minimaux pour mieux intégrer dans le marché du travail des personnes atteintes dans leur santé physique ou psychique. Cela permet que les personnes concernées puissent exercer leur métier et disposer tout de même des autres protections prévues.

Lorsqu’il est question d’augmentations salariales, il importe de noter si la CCT prévoit des ajustements des salaires minimaux ou un calcul sur la base des salaires effectifs. Dans le premier cas, la CCT conserve son rôle de cadre, alors que les effets néfastes de la seconde méthode sont rapidement apparents puisqu’elle peut induire un nivellement par le bas des salaires pratiqués. L’employeur qui aurait souhaité offrir de meilleures conditions à ces collaborateurs en réduisant ses marges peut se trouver en délicatesse avec une CCT ordonnant une augmentation des salaires effectifs quand bien même les rémunérations qu’il pratique sont au-dessus du marché.

Si les règles trop rigides peuvent in fine réduire la protection des travailleurs, alors l’introduction d’un salaire minimum complique l’accès au marché du travail

Brenda Duruz-McEvoy

Même dans le cas des CCT négociées entre partenaires sociaux pour une branche déterminée, les exemples évoqués illustrent la nécessité de pouvoir soustraire certains cas particuliers à l’application d’une norme générale abstraite. Cela évite que des règles trop rigides ne limitent le cercle des travailleurs qui peuvent en bénéficier et que d’autres formes de travail plus précaires ne se développent en marge, tels les «faux indépendants» qui offrent leurs services directement aux privés.

Ce constat doit remettre en question l’inscription de salaires minimaux dans la loi. Car si les règles trop rigides peuvent in fine réduire la protection des travailleurs, alors l’introduction d’un salaire minimum complique l’accès au marché du travail. Cela conduit à l’exclusion des travailleurs les moins productifs et la disparition de postes tremplin tels que les stages ou les contrats à des fins d’intégration.

Au vu de la pénurie actuelle de main-d’œuvre, les entreprises offrent déjà les meilleures conditions possibles pour attirer et retenir les collaborateurs. La préservation d’un marché du travail flexible et dynamique auquel tous participent favorise la prospérité commune.