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Le «démo-scepticisme»: nouvelle démagogie?

Par Brenda Duruz-McEvoy

«Si le financement des rentes est ainsi fragilisé, il faut songer que 13 aujourd’hui pourraient engendrer 11 demain.»
KEYSTONE
«Si le financement des rentes est ainsi fragilisé, il faut songer que 13 aujourd’hui pourraient engendrer 11 demain.»
Brenda Duruz-McEvoy
Centre patronal - Responsable politique sociale
08 décembre 2023, 12h00
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47 milliards de francs, peu ou beaucoup? Dans l’absolu, il faut admettre que la somme est plutôt coquette. Pourtant ce montant, fortune du fonds AVS au 31 décembre 2022, ne correspond qu’à 98,4% des dépenses d’une année et n’atteint donc pas son niveau minimum légal. Exprimé plus simplement: l’AVS présente un découvert de 752 millions à fin 2022.

Or, ce découvert n’est qu’une vue statique du fonds AVS. Quand bien même son niveau légal serait atteint, cela ne garantirait le paiement des rentes que pendant une année. La pérennité de l’AVS tient donc à l’équilibre à long terme entre le flux des recettes et celui des dépenses selon le système de financement par répartition.

Les dépenses sont relativement faciles à extrapoler sur la base des rentiers ainsi que des cohortes de cotisants actuels. En revanche, l’estimation des recettes futures dépend d’hypothèses économiques et démographiques que s’empressent de nier les «démo-sceptiques».

Ce n’est pas la fonte des glaciers qui est remise en cause, mais le vieillissement de la population et le nombre de cotisants par bénéficiaire

Brenda Duruz-McEvoy

Ce n’est pas la fonte des glaciers qui est remise en cause, mais le vieillissement de la population et le nombre de cotisants par bénéficiaire. Les minutieux calculs des meilleurs spécialistes de l’Office fédéral des assurances sociales sont balayés sans considération car les résultats dérangent.

Selon les dernières perspectives financières de l’AVS qui confirment les projections précédentes, les résultats de répartition positifs ne sont attendus que jusqu’en 2030. Avec le départ à la retraite d’une génération très nombreuse, les déficits annoncés sont vertigineux. Face à ce constat, le Parlement a demandé de recevoir, d’ici au 31 décembre 2026, un projet de stabilisation de l’AVS pour la période 2030 à 2040. Le Conseil fédéral a aussi été chargé d’une motion demandant un déficit net nul en 2050 et de fixer également pour l’AVS un objectif de développement durable selon la Constitution.

Pour garantir les rentes, il faudra chercher un subtil équilibre pour augmenter les recettes sans trop prétériter la compétitivité

Brenda Duruz-McEvoy

Ces perspectives ne réjouissent personne. Pour garantir les rentes, il faudra chercher un subtil équilibre pour augmenter les recettes sans trop prétériter la compétitivité, ni léser les générations de travailleurs actifs. Ceux-ci assument déjà aujourd’hui des taux de cotisations salariales plus élevés que ceux dont se sont acquittés les actuels bénéficiaires AVS en leur temps.

Il serait évidemment plus populaire de prôner des augmentations de rente généralisées. Le démo-sceptique ne s’en prive pas: il vante les mérites d’une 13e rente AVS sans craindre la démagogie. Chez le bénéficiaire actuel de l’AVS, il nourrit une revendication inqualifiable de percevoir 13 rentes alors qu’il n’en a octroyé que 12 à ses propres parents et qu’il est six fois plus riche que ses enfants.

Les démo-sceptiques se gardent bien de dévoiler les conséquences de leur court-termisme. Si le financement des rentes est ainsi fragilisé, il faut songer que 13 aujourd’hui pourraient engendrer 11 demain. Par ailleurs, il n’est de recette plus simple ni plus rapide pour retarder l’arrivée à la retraite. La conclusion est limpide: Travailler jusqu’à 70 ans? Non, à la 13e rente AVS!