On a tous expérimenté les capacités conversationnelles «bluffantes» des agents IA, mais ce qui est sans doute plus redoutable, c’est que ces mêmes agents ne font ni faute d’orthographe ni de grammaire et ils parlent toutes les langues. Sujet autrefois combien clivant, la maîtrise du langage ne l’est plus du tout. Désormais tout le monde est sur pied d’égalité. Le monde bascule! C’est, pour l’instant, la principale avancée sociale de cette révolution.
On comprend alors mieux l’hostilité d’une certaine «intelligentsia» (scénaristes, journalistes, écrivains, artistes, universitaires) face au progrès de l’intelligence artificielle (IA) et à l’accès de ces agents conversationnels IA offert à des milliards de personnes. L’ordre social actuel n’en sortira pas sans changement profond. Les cols «blancs» perdant une bataille contre les cols «bleus». La création n’est plus l’œuvre de quelques-uns! Un renversement se profile.
Jamais une technologie n’avait trouvé si rapidement son public avec autant d’applications au quotidien
Xavier Comtesse et Pascal Eichenberger
En un an, les gens se sont emparés massivement des agents conversationnels comme ChatGPT (plus d’un milliard et demi d’utilisateurs par mois). C’est une révolution du grand nombre qui utilise les capacités de ces applications de l’IA pour faire leur courrier, e-mail, post, CV, résumé (de séance ou autres), devoirs, travaux de recherche, etc. ChatGPT est devenu pour une multitude, un outil quotidien indispensable. Plus d’un milliard et quelque de personnes sur la planète l’ont testé, beaucoup l’ont adopté. Jamais une technologie n’avait trouvé si rapidement son public avec autant d’applications au quotidien. C’est cela d’abord l’IA.
Amazon a dû limiter le nombre de livres écrits par l’IA à trois par jour par client. L’IA générative est responsable de cette situation. Chacun s’en est emparé pour écrire. La création littéraire connaît son tsunami. Mais ce n’est pas le seul domaine où l’on voit un tel changement. Photographie, graphisme, peinture, vidéo… tout y passe.
A l’aide de ces nouveaux outils, les gens créent. Dans ce mouvement, les professionnels ne sont plus seuls en première ligne mais ils sont souvent largement devancés par les amateurs. Une inversion historique étonnante. Du coup la production artistique ou littéraire va exploser. C’est aussi le cas dans d’autres domaines de la création comme les sciences où chaque jour, les IA découvrent beaucoup plus que tous les scientifiques réunis, notamment dans les nouveaux matériaux ou les nouvelles protéines. C’est aussi vrai en économie. L’année dernière près de la moitié des start-up de l'Ecole polytechnique fédérale de Zurich (ETHZ) étaient issues de l’IA.
En conclusion, une partie de la population tient sa revanche. L’IA va les placer, au niveau de la maîtrise du langage, à égalité avec les élites universitaires. La maîtrise de la langue n’est plus une barrière. La capacité de créer non plus. La déferlante peut s’engager dans une conquête du savoir et du pouvoir. Que va-t-il sortir demain de tout cela, nul ne le sait aujourd’hui. A cet égard, l’année 2024 sera cruciale tant les nouvelles applications de type: «Agent IA» vont massivement se déployer. Un nouveau monde surgit devant nous!