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La Suisse est la nouvelle championne de la longévité de ses habitants

La qualité du système de santé helvétique participe d'une espérance de vie record. Comment est-ce possible. Faut-il s’en féliciter ou non? Par Jacques Neirynck

L'augmentation de l'espérance de vie est «peut-être aussi le bénéfice des institutions, qui privilégient des relations apaisées entre classes sociales et évitent les aigreurs psychologiques».
KEYSTONE
L'augmentation de l'espérance de vie est «peut-être aussi le bénéfice des institutions, qui privilégient des relations apaisées entre classes sociales et évitent les aigreurs psychologiques».
Jacques Neirynck
Ancien conseiller national
13 février 2023, 10h40
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«La Suisse est la nouvelle championne de la longévité de ses habitants. Les centenaires étaient 377 en 1990, 787 en 2000 et 1888 désormais, dont 75% sont des femmes. Un garçon né dans notre pays en 2021 a la meilleure espérance de vie possible, avec 81,9 années, juste devant les Islandais, les Norvégiens et les Japonais», pouvait-on lire récemment sur RTS Info. Qui poursuivait: «Pour une fille née en 2021, le pronostic est également très favorable, puisque la Suisse se classe 4e, derrière le Japon, la Corée du Sud et l'Espagne, avec 85,6 ans. La Suisse figure également en bonne place sur les chiffres de l'espérance de vie en bonne santé. Un trentenaire d'aujourd'hui peut espérer vivre en bonne santé jusqu'à l'âge de 78,8 ans pour les hommes et de 82,8 ans pour les femmes.»

Comment est-ce possible. Faut-il s’en féliciter ou non?

Selon la thèse politiquement correcte à Berne, cette longévité ne serait due que de façon marginale au système de soins. Cette affirmation est un procédé de basse politique pour laisser entendre que nous dépenserions en vain trop d’argent dans le système de soins. Elle dépend d’une supposition gratuite: en médecine ce serait l’offre qui créerait le besoin. C’est se fixer sur l’image du robuste montagnard, qui n’a jamais vu un médecin, qui n’a jamais été vacciné, qui n’a jamais de rhume, qui travaille jusqu’à la veille de sa mort, frappant d’un coup sans frais médicaux.

Le présent texte diverge de cette mythologie. Car la densité médicale en Suisse est telle que tout un chacun a accès à un généraliste très rapidement et à un spécialiste dans un délai raisonnable. Il existe en plus la ressource des services des urgences.

En Suisse, les mailles du filet sont donc serrées et beaucoup d’affections graves sont heureusement diagnostiquées à temps. Nous disposons d’un système de soins performant, qui est un acteur important de la santé nationale. Son coût est élevé, mais pas plus que les pays voisins et beaucoup moins que les Etats-Unis.

Notre superposition de quatre générations mériterait une révolution culturelle à de multiples facettes

Jacques Neirynck

Les autres causes de ce record de longévité ne sont pas évidentes. Sans doute la pratique du sport, y compris le ski d’altitude en hiver. La bonne qualité des infrastructures qui limite les accidents. Une nourriture équilibrée accessible pour une population au pouvoir d’achat élevé. Peut-être aussi le bénéfice des institutions, qui privilégient des relations apaisées entre classes sociales et évitent les aigreurs psychologiques. Voilà tout ce comment nous produirions plus de centenaires qu’ailleurs. Ce grand âge serait-il un prix attribué à la vertu civique?

Faut-il s’en féliciter? Pour ceux qui en bénéficient, pourvu que leur santé continue d’être bonne. Moins pour les patients moyens qui financent par leurs cotisations d’assurance maladie ce vieillissement.

Notre superposition de quatre générations mériterait une révolution culturelle à de multiples facettes. Par exemple: l’allongement de la durée du travail pour maintenir l’équilibre de l’AVS, ce qui fera grincer des dents; une correcte prise en compte des patients âgés et handicapés; un ministre de la Santé à temps plein au Conseil fédéral, un salaire convenable pour le personnel médical, la formation en Suisse de tout le personnel dont nous avons besoin plutôt que de piller nos voisins.