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La Suisse doit renouer avec ses valeurs libérales

INFUSION DE LIBERTÉ. Le «Zeitgeist» collectiviste n’épargne pas notre pays. Par Diego Taboada

"Evitons d’emprunter toujours plus la route du collectivisme en faisant revivre la flamme de la liberté dans notre pays."
Keystone
"Evitons d’emprunter toujours plus la route du collectivisme en faisant revivre la flamme de la liberté dans notre pays."
Diego Taboada
Liber-thé - Cofondateur
07 juin 2022, 11h00
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En mai dernier, l’hebdomadaire The Economist consacrait un article à la «recette de la superperformance» de l’économie suisse. Classements à l’appui, il soulignait la force des entreprises en comparaison internationale. La Suisse fait en effet partie des bons élèves en termes de création de start-up, de PIB par habitant ou encore de qualité de vie.

Il n’est ainsi pas rare d’entendre observateurs et sympathisants libéraux de l’étranger mobiliser l’exemple suisse comme un modèle de pays qui réussit. On loue çà et là son environnement fiscal attrayant pour les entreprises, sa démocratie participative, son faible taux d’endettement ou encore son organisation institutionnelle décentralisée. Grâce à une sorte d’exceptionnalisme culturel et politique, le «village suisse» au centre de l’Europe résisterait encore et toujours à l’envahisseur collectiviste.

Toutefois, la Suisse n’est malheureusement pas imperméable aux tendances de fond à l'œuvre dans les démocraties occidentales. Le «Zeitgeist» étatiste grandit également dans notre pays et les valeurs libérales semblent perdre de leur attrait dans l’opinion publique.

La recette du succès suisse repose pourtant en partie sur des valeurs qui sont au fondement de la pensée libérale: l’ouverture au commerce, un esprit favorable aux entreprises et une méfiance vis-à-vis de l’État central. Pourtant, les récentes campagnes de votation indiquent que l’adhésion à ces principes semble s’effriter au sein de la population.

Un scepticisme envers le commerce et les entreprises inquiétant

La Suisse est une gagnante de la mondialisation grâce aux échanges commerciaux et à l’accès aux marchés étrangers. Or, la votation de 2021 sur l’accord de libre-échange avec l’Indonésie, finalement acceptée de peu avec 51,7% de voix, a mis en lumière une défiance à l’égard du commerce international au sein de la population.

Pire, au lieu de présenter les avantages du libre-échange pour notre pays, les partisans de l’accord ont surtout insisté sur les garanties données aux opposants à travers des critères écologiques et sociaux inclus dans le projet. Comme si le principe même et les avantages du libre-échange ne pouvaient plus à eux seuls convaincre une majorité du peuple.

De plus en plus d’indices semblent également annoncer la fin de la lune de miel tant vantée à l’étranger entre les Suisses et les entreprises, qu’elles soient locales ou multinationales. Après l’échec de la réforme d’imposition des entreprises (RIE3) en 2018, visant à baisser le taux d’imposition pour la plupart des entreprises, le projet RFFA associait la réforme fiscale à des financements supplémentaires pour l’AVS. La réforme de l’imposition a ensuite été défendue comme un moindre mal, acceptable uniquement car on y intégrait une composante «sociale». Nous étions donc bien loin de revendications pour les avantages en soi d’une taxation modérée.

Plus tard encore, lors de la campagne sur les «entreprises responsables», tout le monde semblait partager le constat des initiants: il était nécessaire de «responsabiliser» les entreprises, en proie à des dérives, presque par nature. Les motivations derrière l’initiative étaient identiques. Le débat tournait avant tout autour des moyens extrêmes portés par l’initiative, et non sur ses prémisses.

La logique du tout État se diffuse aussi en Suisse

Enfin, la crise du Covid-19 a remis la critique du fédéralisme au goût du jour. Notamment en lien avec les dysfonctionnements liés à une répartition des tâches trop brouillonne entre la Confédération et les cantons, des disparités cantonales absurdes, ou encore de longues tergiversations malvenues en tant de crise. Si de rares voix se sont élevées pour défendre les bénéfices du fédéralisme et de la décentralisation, ceux qui auraient souhaité une prise en main plus ferme depuis Berne étaient plus nombreux.

Alors qu’on aime relever le scepticisme traditionnel vis-à-vis des interventions de l’Etat central en Suisse, le réflexe du tout à l’Etat pour aborder les défis n’épargne pas notre pays. Une des dernières propositions en date illustre ce phénomène: le souhait de doter le pays d’un département fédéral dédié à la technologie en faisant passer le conseil fédéral à neuf membres. La Suisse ne fait hélas pas exception: face à un problème quelconque, on demande davantage de bureaucratie et de règles.

Pour surmonter les défis majeurs des prochaines années, il faudra miser sur les recettes qui ont fait la prospérité de la Suisse. Il sera nécessaire de renouer collectivement avec les valeurs libérales, pour remporter l’enthousiasme et l’adhésion de la population. Les amoureux de la liberté devront mettre le pied à l’étrier en montrant que les principes libéraux ne sont pas une relique du passé, mais la solution pour l’avenir. Evitons d’emprunter toujours plus la route du collectivisme en faisant revivre la flamme de la liberté dans notre pays.