Le 6 juillet dernier, une majorité du Parlement européen a approuvé l’inclusion du gaz et de l’énergie nucléaire dans la taxonomie des investissements verts de l’Union européenne (UE). Il s’agit là d’une décision politique de première importance, dont la Suisse devrait s’inspirer. D’autant que les conséquences de l’agression militaire russe contre l’Ukraine, qui entre désormais dans son sixième mois, aggravent le risque pour notre pays d’endurer des pénuries de gaz et d’électricité, ce dès cet hiver 2022-2023.
La taxonomie de l’UE vise à orienter les investissements privés vers les activités nécessaires pour parvenir à la neutralité climatique. Sur la base d’avis scientifiques et de l’état actuel des technologies, la Commission européenne a proposé, juste avant l’agression russe, d’inclure dans cette taxonomie des investissements privés dans des activités gazières et nucléaires, ces dernières ayant à jouer un rôle dans la transition énergétique. Cette adaptation majeure entrera en vigueur le 1er janvier 2023, puisqu’elle n’a été bloquée ni par les ministres des 27 Etats membres de l’UE, ni par le Parlement européen.
Certes, cette adaptation majeure de la taxonomie de l’UE en matière d’investissements dits durables est soumise aux conditions strictes suivantes:
-contribuer, tant pour les activités gazières que nucléaires, à la transition vers la neutralité climatique;
-satisfaire à des exigences de sûreté nucléaire et environnementale pour les activités nucléaires;
-contribuer à l’abandon du charbon (alors que des centrales à charbon sont remises en service en Allemagne et en Autriche, à la suite de l’agression russe!) au profit de sources d’énergies renouvelables (hydraulique, éolien, solaire, biomasse, géothermie).
Mais il n’en demeure pas moins que l’UE permet désormais à ses Etats membres qui le souhaitent de mener à bien des programmes nucléaires civils et gaziers ambitieux, sans devoir emprunter à des coûts prohibitifs, la taxonomie verte de l’UE impactant tout le secteur financier.
La Suisse est en panne de politiques énergétique et climatique crédibles
Patrick Eperon
En ce sens, la France pourrait lancer, à la suite de la renationalisation à 100% d’EDF, la réalisation de nouveaux réacteurs nucléaires (EPR), d’autant que le président Macron devrait être soutenu sur ce point par une majorité de l’Assemblée nationale française.
La Suisse, en panne de politiques énergétique et climatique crédibles, devrait s’inspirer de cette adaptation des politiques énergétique et climatique de l’UE et mettre en œuvre des investissements gaziers (approvisionnement en gaz non russe) d’abord, nucléaires ensuite. Le nouveau Conseil d’Etat vaudois serait quant à lui bien inspiré d’initier le déblocage du projet visant à extraire du gaz aux environs de Noville (à l’est du lac Léman), le gisement identifié à cet endroit permettant a priori de couvrir pas moins d’un quart de siècle de la consommation suisse de gaz.