Une entreprise industrielle familiale romande dirigée par un membre de la famille, c’est rare. C’est à préserver! D’autant plus que le sécateur rouge – comme le couteau suisse – est mondialement connu. C’est dans son secteur un produit de luxe. Du haut de gamme par sa qualité, son design, sa longévité, le sécateur de Felco est indestructible. Bien qu’il soit produit à plus d’un million d’exemplaires par an, il est, à l’image de la montre Rolex, désiré. Il y a même des collectionneurs de sécateurs Felco!
Pendant les années de pandémie (2020-2021), le chiffre d’affaires avait explosé, les gens, de retour pour de longue période à domicile, avaient beaucoup jardiné alors. Aujourd’hui, les choses sont revenues à la situation qui prévalait en 2019. Mais toutes les questions d’alors se posent à nouveau, notamment celle de la croissance lorsque vous avez atteint des sommets.
Discussion avec Nabil Francis, le patron copropriétaire de ce bijou industriel neuchâtelois.
A la question de comment grandir, Nabil Francis, répond que comme pour toute entreprise, «vous avez le choix entre étoffer votre offre pour vos clients ou chercher de nouveaux clients. Eh bien, nous allons faire les deux en même temps. D’abord, en investissant dans la R&D pour lancer un nouveau sécateur électroportatif Felco qui va redéfinir les standards du marché. En proposant de nouvelles fonctionnalités qui enrichissent notre offre en manuel, nous allons proposer un nouveau sécateur manuel qui donne 30% de force en plus et une prise en main encore plus optimisée avec des matériaux plus nobles. Ensuite, nous avons lancé une nouvelle marque de sécateurs (Alpen Swiss Tools) qui va remplir un espace client d’entrée de gamme pour nous: un sécateur jaune moins cher mais qui bénéficiera de notre savoir-faire avec les caractéristiques de fiabilité et durabilité comparables.»
Deux produits différents, deux publics différents, deux prix différents mais un seul savoir-faire semble une réponse forte
Nabil Francis, CEO de Felco
Si je comprends bien, le sécateur «Alpen» va dans le sens de la marque Tudor de Rolex à savoir, aller à la rencontre d’une clientèle qui cherche une qualité premium, mais pour qui le prix reste un obstacle. Dans le cas de Tudor, on voit bien qu’un public peut désormais se procurer une telle montre… Est-ce la même idée?
«Oui un peu, répond Nabil Francis, même si nous n’avions pas votre analogie Tudor/Rolex en tête en nous lançant dans cette nouvelle aventure industrielle. Car pour nous il fallait préserver le haut de gamme et faire grandir tout en agrandissant notre base client. Vous savez, quand une entreprise industrielle moyenne pareillement orientée à l’international (95% d’export) doit se réinventer, elle doit penser d’abord à sa clientèle américaine, asiatique, européenne et offrir des références produits adaptés pour l’ensemble des marchés et en même temps maintenir la concurrence à distance. Dans ces conditions chahutées notamment par les soubresauts de l’économie mondiale, le prix est un facteur déterminant. Donc deux produits différents, deux publics différents, deux prix différents mais un seul savoir-faire semble une réponse forte.»
Dans le canton de Neuchâtel, Felco est considéré comme un fleuron non seulement parce que l’entreprise est un bon employeur mais aussi parce qu’elle représente une «success-story». Le lancement d’une nouvelle marque sera donc suivi de près. Les risques mais aussi les opportunités que cela signifie font toujours jaser.
Il faut comprendre que dans ce canton l’industrie représente encore quelque chose de très important (40% des emplois) et donc les aventures industrielles se vivent avec les tripes. Le lancement d’un nouveau sécateur jaune est peu banal et tout le monde espère son succès!