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La ville «kilowattheure»

Le climat, le numérique et le tout-électrique redéfinissent l’aménagement urbain. Par Xavier Comtesse

«L’hypercentre créait de la valeur, par exemple le quartier des banques autour de la Bourse. Aujourd’hui, le digital crée du réseau et donc supprime les distances»
KEYSTONE
«L’hypercentre créait de la valeur, par exemple le quartier des banques autour de la Bourse. Aujourd’hui, le digital crée du réseau et donc supprime les distances»
Xavier Comtesse
Manufacture Thinking - Mathématicien et président
12 juin 2023, 15h00
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Le temps statistique ne permet pas d’avoir des données précises sur la transformation en cours des villes. Seule l’observation de quelques signaux faibles montre une ville en grande transformation. Prenons quelques exemples: depuis le Covid-19, de nombreux véhicules de livraison (notamment de repas à domicile) sillonnent les rues.

Parallèlement, les restaurants se vident. Le télétravail laisse des bureaux sans travailleurs. De nouveaux habitants peuplent la périphérie. Les trottinettes et vélos électriques foncent sur les chaussées. Le commerce est en ligne et, simultanément, de petites surfaces commerciales occupent la place abandonnée par les plus grandes. Les aéroports sont les nouvelles gares des villes. Les vendredis deviennent parfois jours fériés. Toutes ces observations représentent des changements qui vont se transformer en tendance de fond.

Pour se faire une idée de l’ampleur du changement potentiel que représentent ces observations, souvenons-nous d’un mouvement commencé il y a près de soixante ans et qui s’étendra par la suite massivement: la création des rues piétonnes.

Fermée à la circulation motorisée en 1962, la rue de Bourg à Lausanne fut la première rue piétonne de Suisse. Depuis lors, le chemin était tout tracé: ouverture de nombreuses routes piétonnes, création de pistes cyclables, réorganisation du trafic avec sens interdits et giratoires, parkings en surface supprimés, ralentissement généralisé de la vitesse du trafic jusqu’à 20 km/h, etc. ont tous eu raison de la voiture en ville. L’ère du «kilomètre heure». La tendance installée petit à petit comme une lame de fond va changer indiscutablement la vie en ville pour toujours.

Les magasins, les restaurants, les banques offriront des temps de recharge pour attirer les clients.

Xavier Comtesse

Si la ville se modifie comme jamais aujourd’hui, c’est dû à trois phénomènes qui influencent conjointement sa transformation: le climat, le digital et le tout-électrique (moteurs électriques, batteries, panneaux solaires, etc.).

Prenons-les dans l’ordre:

1. La question du réchauffement pousse les villes vers la végétalisation. Immeubles, squares, parcs voient de nouvelles plantations d’arbres. On essaie de lutter ainsi contre des îlots de chaleur… Genève vise 30% de couverture canopée d’ici à 2050!

2. Hier, l’hypercentre créait de la valeur, par exemple le quartier des banques autour de la Bourse. Aujourd’hui, le digital crée du réseau et donc supprime les distances. Le périphérique est le nouveau «hype», par exemple à Genève, la banque Lombard Odier se déplace au Vengeron, nœud autoroutier et ferroviaire.

3. Vers la ville tout-électrique. C’est peut-être la tendance la plus forte. Panneaux solaires, pompes à chaleur, hydrogène (électrolyse), batteries au lithium, etc., tous ont besoin d’électricité. La ville se transforme à grande vitesse vers le tout-électrique.

Les conséquences vont être importantes car cela va impacter les transports, les entreprises et les particuliers. Plus d’essence, ni mazout en ville… Cela veut dire moins de pollution bien sûr, mais aussi des panneaux solaires et des batteries, des bornes électriques et des recharges rapides partout! On se déplacera d’une recharge à l’autre… Un peu comme avec nos iPhones aujourd’hui! La vie s’organisera autour des bornes. Les magasins, les restaurants, les banques offriront des temps de recharge pour attirer les clients. Un monde du «kilowattheure» en somme.