Ma journée fut ponctuée d’interactions avec des agents s’agrippant à la notion d’ordre. Dans un monde où leurs chefs seraient des entrepreneurs, ils agiraient différemment. Amusons-nous un moment avec cette idée.Le premier portait un badge qui indiquait «agent commercial» avec le logo des CFF. Le deuxième était un digne représentant de la police de Lavaux (APOL).
Le premier surprit mon collègue avec qui je faisais l’aller-retour de Genève à Lausanne en train. Son abonnement demi-tarif 2 ans était échu de 2 jours. Résultat des courses: paiement du supplément de billet, quelques francs de plus pour les émoluments et possibilité de se faire rembourser le supplément en présentant tous ces reçus devant un guichet – eh oui ça existe encore pour régler ce genre de cas – dans la mesure où l’abonnement est renouvelé. Lorsque nous nous sommes permis de dire que c’était bien compliqué pour peu de choses, la réponse fut que le supplément aurait pu être bien plus important. C’était à sa discrétion de le diminuer. Probablement une justification de son badge d’agent commercial!
Le deuxième m’observa à 22 heures au carrefour de sortie de Lutry et constata que je n’avais pas mis le clignotant au bon moment. Il me suivit sur 1 km avant de m’arrêter sur le bord de la route alors que j’arrivais chez mon frère qui réside sur la commune. J’eus alors l’impression d’être un dealer ou un criminel. Lampes torches dirigées sur ma figure, ensuite sur le contenu de ma voiture avant la question tant attendue: «permis de conduire et carte grise». S’en suivit une bonne occasion de tester ma capacité à souffler dans l’alcool test qui ne révéla pas d’état d’ébriété. Résultat des courses: amende de 100 francs pour non utilisation du clignotant. Lorsque je me permis de poser la question si j’avais mis la vie de qui que ce soit en danger car aucune voiture ou piéton n’était visible au moment de la terrible infraction, la réponse fut: non et si c’était le cas ce serait plus cher!Rêvons quelques minutes. Quelles seraient les instructions de ces agents si leurs chefs étaient des entrepreneurs?
Le premier aurait saisi l’occasion pour renouveler l’abonnement de mon collègue sur place. L’offre aurait été un renouvellement de 1 an sans surtaxe sur le billet. Avec un renouvellement immédiat de deux ans, le billet Lausanne – Genève aurait été offert. Le reçu aurait fait foi avant que le nouvel abonnement parvienne par la poste au plus tard le surlendemain.Le deuxième m’aurait simplement dit qu’il faisait des rondes régulières avec son collègue pour assurer la sécurité sur le territoire de la commune. Il aurait indiqué que l’utilisation des clignotants était obligatoire même sans aucune voiture visible à l’horizon. Il m’aurait remis une brochure expliquant la politique de sécurité de la ville et m’invitant à considérer venir m’installer dans ce havre de paix. En effet la fréquence des rondes de police leur permet non seulement de rappeler aux bourgeois les règles de la circulation, mais également de libérer les trottoirs devant les écoles de tous les dealers qui sévissent habituellement dans les communes où la surveillance est plus lacunaire.Peut-être même que des entrepreneurs mettraient le sens de l’humour dans les critères de recrutement. On peut toujours rêver.