C’est autour des derniers jours de juillet et des premiers d’août que la consommation matérielle de l’humanité commence à dépasser la capacité des systèmes naturels; pour les pays industriels la date fatidique intervient début mai. Le solde de l’année nous vivons donc sur les réserves accumulées, pour certaines, durant des temps géologiques.
Des responsabilités communes mais différenciées
S’agissant de notre pays, l’Office fédéral de la statistique indique que «la consommation suisse par personne est 2,8 fois plus grande que les prestations et ressources environnementales globales disponibles par personne […]. Nous vivons donc aux dépens des générations futures et d’autres régions du globe». Il nous faudrait diviser par 3 notre empreinte matérielle. Concernant les gaz à effet de serre (GES), la réduction nécessaire est le double, un facteur 6!
Dans le monde, en termes d’impacts matériels et d’émissions de GES, on relève des différences considérables entre les territoires et les catégories socio-économiques. En faisant appel à des ressources 9 fois plus importantes que sa juste part, le Qatar détient le record mondial du dépassement. Concernant les émissions de gaz à effet de serre (GES), la tête du peloton est formée des 10% d’Américains les plus riches qui émettent… 69 tonnes d’équivalents CO2 par personne et par an, environ 50 fois plus que ce qui est scientifiquement acceptable!
Mobiliser tous les leviers efficaces
Comme les GES se répandent uniformément dans l’atmosphère, ils impactent aussi des régions à faibles émissions mais qui vont subir de plein fouet le changement climatique (grandes villes en bord de mer, îles, zones rurales frappées par la sécheresse, etc.). Le principe affirmé dans les documents internationaux soulignant les «responsabilités communes mais différenciées» n’a rien perdu de sa pertinence.
Globalement comme localement, la trilogie gagnante est une action sur la demande à la fois par la sobriété et par une meilleure efficience technique, le passage aux énergies renouvelables et à l’économie circulaire (où les déchets d’aujourd’hui sont les ressources de demain) et la justice climatique.
La délicate question des compensations
Et la compensation des émissions de GES dans tout cela? Les critiques faites aux mécanismes de compensation, si elles sont justifiées lorsque la compensation n’est pas pertinente, a un effet négatif sur d’autres aspects de la durabilité (par exemple la biodiversité) ou se révèle carrément inexistante, ne doivent pas conduire à jeter l’enfant avec l’eau du bain.
En effet, une des approches est de renaturer des zones déboisées, des sols dégradés ou des plans d’eau asséchés. Faisant de plus coup double, on augmente à la fois leur capacité à stocker du carbone et on agit pour la biodiversité.
Mais bien évidemment toute compensation n’est légitime que si les possibilités d’éviter les émissions à la source sont objectivement épuisées, et qu’elle est additionnelle, c’est-à-dire qu’on ne se contente pas d’acheter des surfaces déjà renaturées mais qu’on s’oblige à en aménager de nouvelles. C’est aussi pourquoi on parle de moins en moins de compensation mais de contribution et d’impact. Ces conditions réunies, il n’y a aucune raison de s’en priver.