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COP 15 de la convention sur la biodiversité: quels progrès?

Il ne s’agit pas de ne plus utiliser les ressources de la nature, mais de les maintenir en état pour pouvoir en disposer sur la durée. Par René Longet

Comme l’écrit le document préparatoire à la COP 15, «malgré certains progrès réalisés, aucun des objectifs d’Aichi pour la biodiversité n’a été pleinement atteint».
KEYSTONE
Comme l’écrit le document préparatoire à la COP 15, «malgré certains progrès réalisés, aucun des objectifs d’Aichi pour la biodiversité n’a été pleinement atteint».
René Longet
Expert en développement durable
15 décembre 2022, 18h30
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Comme la politique climatique, la politique de la biodiversité repose essentiellement sur des changements de pratiques dans d’autres secteurs. En l’occurrence c’est l’usage du sol qui doit changer, au niveau des méthodes agricoles et sylvicoles et de son utilisation pour des bâtiments et des infrastructures. Il s’agit aussi de réduire la pollution de l’environnement par les substances de synthèse (molécules écotoxiques, matières plastiques) et la destruction des effectifs des espèces terrestres et marines (en empêchant la surpêche). En parallèle il convient de maintenir suffisamment d’espaces à l’état naturel pour servir de refuge aux espèces et leur permettre de rester en connexion (infrastructure écologique).

C’est la seule manière de préserver les multiples fonctions écosystémiques de la biodiversité sans lesquelles nous ne pourrions guère survivre dans des conditions acceptables sur cette Terre. Certains s’insurgent contre cette approche en la qualifiant d’utilitariste et voudraient par exemple accorder à des éléments de la nature (montagnes, fleuves...) un statut de sujet et non plus d’objet du droit. Mais l’humanité doit déjà apprendre à faire la différence entre gestion et destruction des espèces animales et végétales dont elle a besoin pour vivre. Il ne s’agit pas de ne plus utiliser les ressources de la nature, mais de les maintenir en état pour pouvoir en disposer sur la durée...

En 2010, avaient été retenus les 20 objectifs d’Aichi, lieu d’une COP précédente, excellemment formulés et pertinents. Comme l’écrit le document préparatoire à la COP 15, «malgré certains progrès réalisés, aucun des objectifs d’Aichi pour la biodiversité n’a été pleinement atteint». Rien ne dit qu’il en ira autrement avec le Cadre mondial de la biodiversité discuté à Montréal.

Sans gêne aucune, le lobby agricole est vent debout contre toute conditionnalité mise à ces subventions massives sans lesquelles la plupart des exploitations ne tourneraient pas

René Longet

Prenons l’exemple de la politique agricole: plus de 3 milliards de subventions en Suisse et un bon tiers du budget de l’UE. Sans gêne aucune, le lobby agricole est vent debout contre toute conditionnalité mise à ces subventions massives sans lesquelles la plupart des exploitations ne tourneraient pas. Et on entend des acteurs qui ne se sont jamais inquiétés de la faim dans le monde instrumentaliser ce drame pour plaider pour une agriculture destructrice de la fertilité naturelle des sols, niveleuse des sortes et des territoires, polluante à souhait.

Alors que les méthodes agroécologiques valorisant les insectes pollinisateurs, les micro-organismes du sol et les ennemis naturels des prédateurs des cultures – et protègent leurs biotopes – sont les seules capables de nourrir l'humanité en nombre croissant sans détruire les sols ni la condition paysanne... Tout récemment encore le Conseil des Etats révisait  à la baisse les engagements de l’agriculture pour la biodiversité.

Toutes les bonnes résolutions du monde resteront vaines tant qu’on n’acceptera pas de considérer la nature comme notre assurance vie et pas comme un ennemi à vaincre. Gagner la guerre menée à la nature serait tout perdre.