A la fin de l’été dernier le prix de l’électricité s’est mis à flamber, suite à l'envolée de celui du gaz provoquée par la guerre en Ukraine et les restrictions russes dans les livraisons de celui-ci. Tout le monde s’est affolé. Les contrats électriques devinrent prohibitifs. Certaines entreprises anticipèrent le pire avec des factures pouvant passer de 300.000 à 5 millions de francs. Que faire?
La discussion politique s’envenima, le conseiller fédéral Guy Parmelin allant jusqu’à évoquer un risque de black-out pour l’hiver suivant (2022-2023). Rien de tel n’est arrivé! Hiver trop doux et économie volontaire ont suffi cette fois. Mais attention à l’hiver prochain menacent les sceptiques.
Mais qu’en est-il réellement?
Regardons tout cela avec un industriel clairvoyant et prompt à l’action, Hugo van Buel, patron de Cla-Val près de Lausanne. Ecoutons-le:
«D’abord, il fallait comprendre l’importance de produire de l’électricité soi-même. Lorsque nous avons posé des panneaux photovoltaïques sur le toit de l’usine et sur les ateliers, notre objectif était de faire d’une pierre deux coups. En effet, en agissant sur notre emprunte carbone nous réduisons en même temps votre facture d’électricité tout en vendant nous-même le surplus d’électricité au réseau. Quand, la menace du black-out est arrivée, là nous avons agi différemment car il était inconcevable que l’usine s’arrête. Plus encore, il s’agissait d’avoir une autonomie complète sur une durée définie. On a donc acheté des générateurs pour produire nous-mêmes et allons compléter le dispositif (avec batterie) pour être indépendant des fournisseurs d’électricité. Aujourd’hui, en cas de coupure et en quelques secondes, le système s’enclenche et l’entier du site Cla-Val est autonome et autosuffisant. On l’a testé cela marche. Conséquence: on a totalement diminué le risque d’approvisionnement défaillant. C’est comme cela qu’il faut agir. Même si la facture d’électricité est plus chère qu’avant, elle n’est pas nécessairement un facteur de délocalisation. C’est souvent pire ailleurs, sauf dans les pays producteurs d’hydrocarbures!»
On ne doit pas être si dépendant de l’étranger. Les prix et surtout l’approvisionnement ne doivent pas être décidés ailleurs
Xavier Comtesse
Il y a trois grandes leçons (pour les entreprises, les particuliers mais aussi l’Etat) à tirer de ces événements récents:
1. Il faut chercher l’autonomie énergétique quoiqu’il arrive. On ne doit pas être si dépendant de l’étranger. Les prix et surtout l’approvisionnement ne doivent pas être décidés ailleurs. Il faut rester maître chez soi. C’est une priorité absolue que vous soyez entrepreneur ou politicien, c’est le même raisonnement qui fait foi. Ensuite c’est clairement le photovoltaïque (éventuellement les éoliennes) qu’il faut favoriser car il n’a besoin que de soleil (ou de vent) et pas d’uranium ou d’hydrocarbure importés;
2. A terme, pour une autonomie totale, il faut résoudre le problème des batteries à longue durée pour éviter définitivement la dépendance aux hydrocarbures;
3. Les réseaux électriques installés doivent évoluer vers une production/distribution horizontale. Jusqu’à aujourd’hui, les réseaux servaient tout le monde à partir d’une centrale électrique (barrage, nucléaire ou gaz). C’est une architecture verticale. Passer du vertical à l’horizontal nécessite un changement conceptuel majeur mais aussi un défi technique. D’une production centralisée, avec quelques dizaines d’acteurs principaux, vers une production décentralisée avec des millions de consom’acteurs!