Juste avant la session en cours des Chambres fédérales, les commissions des finances ont pu prendre connaissance des chiffres relatifs au résultat 2022 des comptes de la Confédération et aux perspectives budgétaires 2024-2026. Les nouvelles ne sont pas bonnes, puisque les comptes bouclent sur un déficit de 4,3 milliards de francs, dû en particulier à la diminution des recettes et l’importance des dépenses extraordinaires liées à la pandémie. Pour la première fois depuis 2005, le déficit de financement ordinaire est ainsi plus élevé que ce qui était autorisé par le frein à l'endettement.
Les perspectives financières pour les années à venir étant tout aussi sombres, le Conseil fédéral a déjà pris quelques décisions afin de redresser la situation, prévoyant notamment des mesures d’assainissement pour le budget 2024. C’est d’autant plus indispensable qu’ensuite des dépenses extraordinaires engagées dans le cadre de la crise du Covid, le compte d’amortissement lié au frein à l’endettement présente un découvert qu’il s’agit de compenser. En mars 2022, le Conseil fédéral avait adopté un plan pour y parvenir dans un délai de treize ans, sans programme d’austérité budgétaire ni hausse d’impôt, en comptant uniquement sur les excédents annuels des comptes fédéraux… et sur les distributions additionnelles de la Banque nationale.
On se demande désormais dans quelle mesure ce plan d’assainissement pourra être respecté. Après avoir réalisé en début d’année le caractère aléatoire des distributions d’argent de la BNS, on voit maintenant que les comptes annuels de la Confédération ne pourront pas ou plus forcément régulièrement dégager les excédents espérés.
Les budgets fédéraux vont être confrontés à de potentielles nouvelles dépenses dans les domaines de l’armée ou de la politique climatique
Olivier Rau
A moyen terme, on s’attend à ce que le vieillissement de la population et le réchauffement climatique viennent peser sur les finances publiques. A court terme, les budgets fédéraux vont être confrontés à de potentielles nouvelles dépenses dans les domaines de l’armée, de la politique climatique (contre-projet indirect à l’initiative sur les glaciers), de la santé (contre-projet indirect à l’initiative pour l’allègement des primes d’assurance-maladie), des transports (fonds d’infrastructure ferroviaire, transport ferroviaire de marchandises), de l’accueil extra-familial des enfants (qui ne relève pourtant pas d’une compétence fédérale) et de la recherche (contribution au programme Horizon Europe).
Le Parlement a véritablement un rôle à jouer dans le maintien de la rigueur budgétaire et dans la maîtrise des nouvelles dépenses. Il en va également de la responsabilité de ceux qui en appellent trop souvent aux moyens de l’Etat pour résoudre tous les problèmes qui se posent.
C’est donc à tous les niveaux qu’il faut faire preuve de retenue si l’on veut que les comptes de la Confédération non seulement redeviennent équilibrés, mais permettent aussi, dans un délai raisonnable, d’effacer l’endettement lié à la crise du Covid. On a pu constater à quel point des finances saines ont permis de faire face rapidement et efficacement à une situation de crise, sans mettre l’Etat à genoux.
Il faut maintenant en tirer la conclusion qui s’impose, en modérant les dépenses publiques jusqu’à ce que la situation financière de la Confédération soit assainie, et en continuant bien sûr à respecter strictement le cadre fixé par le frein à l’endettement.