Dans le canton d’Obwald, les autorités ont la mine réjouie. Elles accueillent depuis plusieurs mois de nouveaux résidents norvégiens, qui fuient la hausse de l’impôt sur la fortune, récemment augmenté à 1,1% dans leur pays. «Confiscatoire!», jugeait un conseiller national obwaldien qui expliquait ces faits lors d’une conférence à laquelle j’assistais. Ce parlementaire fédéral ne semblait guère savoir qu’à Genève, l’impôt sur la fortune est de 1%, donc à peine plus bas que le norvégien, et qu’une initiative, sur laquelle le peuple genevois se prononcera le 18 juin, vise à le faire passer à… 1,5%! Qu’en penserait-on à Obwald, où l’impôt sur la fortune est de 0,14%? Probablement à faire un peu de publicité pour attirer non seulement les Norvégiens, mais les Genevois en prime!
On comprend mal la volonté des auteurs de l’initiative 185 de taxer toujours plus, alors que les recettes fiscales ne manquent pas à Genève. Leur augmentation excède ainsi largement l’augmentation de la population. Ainsi, entre 2011 et 2021, la population a progressé de 10% et les recettes fiscales de 40%.
Remontant plus loin dans le temps, on constate que les recettes fiscales genevoises ont augmenté de 147% entre 1990 et 2021, malgré une baisse d’impôt sur le revenu de 12% en 1999. Au vu de ces constats, un projet de loi vise à baisser l’impôt sur le revenu de 5%. Une mesure juste et proportionnée au vu des chiffres. Quant à l’impôt sur la fortune, ses recettes ont augmenté de 450% entre 1990 et 2021! Il serait donc plus juste de le baisser que de l’augmenter.
Les cantons taxent différemment l’outil de travail, et à Genève, il est lourdement taxé
Véronique Kämpfen
En Norvège comme en Suisse, l’impôt sur la fortune touche principalement les chefs d’entreprise. Les cantons taxent différemment l’outil de travail, et à Genève, il est lourdement taxé. Un chef d’entreprise y paie un impôt sur le bénéfice et la taxe professionnelle communale (cette dernière est une spécificité genevoise datant de Napoléon. Elle devrait prochainement être abolie, ce qui entraînera une augmentation de l’impôt sur le bénéfice). Il paie ensuite l’impôt sur le capital de l’entreprise, un impôt qui n’existe nulle part ailleurs. Il s’acquitte également de la redevance TV au titre de sa société, alors qu’il la paie déjà en tant que personne physique, et que chacun de ses collaborateurs la paie également à titre individuel, ce qui laisse songeur. Il paie un impôt sur le revenu et les charges sociales y afférentes, puisqu’il est en principe salarié de son entreprise, et un impôt sur le revenu au titre du dividende lorsqu’il se le distribue. Enfin, il paie un impôt sur la fortune pour la valeur de son entreprise.
Au mois de juin, en plus de l’initiative 185, d’autres textes fiscaux sont au menu à Genève. La plupart ont une incidence directe sur les patronnes et patrons de PME et leur outil de travail. Il est indispensable d’avoir une vision claire de ce que ces charges représentent si l’on veut continuer à développer une économie dynamique et durable, qui permette de maintenir et de créer des emplois.
Taxer toujours davantage celles et ceux qui génèrent des revenus fiscaux n’est pas la bonne formule. Bien au contraire. Il serait bien plus profitable d’alléger les lourdes charges qui pèsent sur les entrepreneurs et sur l’ensemble des contribuables.