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Action collective et responsabilité individuelle

La modification du code de procédure civile risque de profiter aux quérulents. Par Sophie Paschoud

On a le sentiment que le but premier de l'action collective n'est pas tant de permettre aux lésés d'obtenir réparation que d'accorder aux organisations la faculté d'«obtenir justice», selon Sophie Paschoud.
Keystone
On a le sentiment que le but premier de l'action collective n'est pas tant de permettre aux lésés d'obtenir réparation que d'accorder aux organisations la faculté d'«obtenir justice», selon Sophie Paschoud.
Sophie Paschoud
Centre patronal - Juriste
15 décembre 2021, 14h06
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Le 10 décembre dernier, le Conseil fédéral a transmis aux Chambres son Message sur une modification du code de procédure civile (Action des organisations et transaction collective) et le projet de loi y relatif. Il y consacre en particulier la possibilité pour les organisations à but non lucratif, à certaines conditions, d'intenter des actions visant à la réparation de dommages collectifs, en leur nom propre et à leurs propres risques.

Un des principaux arguments avancés en faveur de ce nouvel instrument est que, à l'heure actuelle, la nécessité de faire valoir ses droits de manière individuelle conduirait de nombreux lésés à renoncer à une action «notamment lorsque le dommage est mineur». Ce raisonnement est peu pertinent, dès lors que ce constat vaut pour toutes les situations et non seulement lors d'un dommage collectif. C'est là le résultat d'une balance des intérêts, que chacun est libre d'effectuer, entre les inconvénients de la procédure et le bénéfice attendu.

En réalité, on a le sentiment que le but premier de l'action collective n'est pas tant de permettre aux lésés d'obtenir réparation (les instruments du droit actuel suffisent à cet égard) que d'accorder aux organisations la faculté d'«obtenir justice» en veillant à ce que les responsables présumés de dommages collectifs assument les conséquences de leurs actes. Autrement dit, l'objectif apparaît avant tout punitif, fonction qui ressortit au droit pénal et non au droit de la responsabilité civile.

Le risque d'abus est tout sauf négligeable

Sophie Paschoud

Enfin, le risque d'abus est tout sauf négligeable. Certaines entreprises pourraient être amenées, face à la menace d'une action, à opter pour une transaction, afin de préserver leur image et de s'épargner les inconvénients d'une longue procédure, alors même qu'il ne serait pas démontré que leur responsabilité est engagée. Certaines organisations marquées politiquement pourraient en outre user de l'action collective aux seules fins de servir leur idéologie.

La décision de s'adresser ou non à la justice est affaire de responsabilité individuelle, tout comme le fait d'assumer les frais pour la partie qui succombe. C'est aussi un moyen de prévenir la quérulence.