Les entreprises suisses devront contrôler, dès l'exercice 2023, les risques de leurs activités pour l'environnement et la population à l'étranger. Le contre-projet indirect à l'initiative «pour des entreprises responsables» entrera en vigueur le 1er janvier 2022 et les entreprises auront une année pour se préparer.
Le contre-projet indirect élaboré par le Parlement ne va pas aussi loin que l'initiative, acceptée par le peuple mais refusée à la majorité des cantons le 29 novembre 2020. Il ne réglemente pas explicitement la responsabilité de la maison-mère pour les entreprises contrôlées à l'étranger.
Il s'agit «d'une législation en phase avec les réglementations en vigueur dans d'autres pays, s'inspirant en particulier de celles de l'UE», souligne vendredi le Conseil fédéral.
Devoir de diligence étendu
«Dans un esprit de transparence», les grandes entreprises suisses devront rendre compte des risques engendrés par leur activité: elles devront établir un rapport sur les questions environnementales, sociales et de personnel, le respect des droits de l'homme et la lutte contre la corruption. Elles devront également présenter les mesures qu'elles ont adoptées dans ces domaines.
Les entreprises «dont l'activité présente des risques» devront en outre respecter des devoirs de diligence étendus en matière de travail des enfants et des minerais et métaux provenant de zones de conflit.
En cas d'infraction aux nouvelles obligations de rendre compte des risques que font courir leurs activités commerciales à l'étranger, une amende allant jusqu'à 100000 francs est prévue.
PME aussi concernées
Le Conseil fédéral a précisé les détails de ces obligations dans une ordonnance. Comme la directive européenne correspondante, elle fixe des seuils de volume pour l'importation et la transformation de minerais et métaux de la guerre en dessous desquels les entreprises seront exemptées des devoirs de diligence et de faire un rapport.
Ces limites pourront être adaptées en tout temps en fonction des évolutions éventuelles au sein de l'UE.
A l'issue de la consultation, le Conseil fédéral a décidé de durcir l'ordonnance en ce qui concerne le travail des enfants. Les PME seront également soumises aux devoirs de diligence et à l'obligation de faire rapport lorsqu'elles proposent des biens ou services qui ont manifestement été produits ou fournis avec le recours au travail des enfants.
Avec une telle réglementation, la Suisse va plus loin que l'UE, qui limite pour l'heure les devoirs de diligence au domaine des minerais et métaux provenant de zones de conflit ou à haut risque, souligne le gouvernement.
Ces nouvelles dispositions entreront en vigueur le 1er janvier prochain. La loi donne un an aux entreprises pour se préparer à leurs nouvelles obligations. Elles devront s'y soumettre pour la première fois durant l'exercice 2023.
Grands groupes visés
L'initiative populaire exigeait des sociétés qui ont leur siège en Suisse de veiller au respect des droits de l'homme et des normes environnementales internationalement reconnues. Ces sociétés auraient dû effectuer ces contrôles pour leurs activités en Suisse, mais aussi pour celles à l'étranger.
Les multinationales auraient répondu des dommages causés par leurs filiales, mais pas pour les actions de leurs fournisseurs. Si une violation était commise par l'une de leurs filiales à l'étranger, la maison-mère en aurait été tenue responsable, à moins qu'elle ne démontre qu'elle a fait preuve de la diligence requise pour prévenir le dommage.
Le contre-projet indirect avait déjà été critiqué à de nombreuses reprises lors de la campagne de votation. En juillet, une coalition d'une quarantaine d'ONG a critiqué le projet d'ordonnance, qu'elle a qualifié de «farce». Pour elle, il s'agit d'un projet «inefficace» et d'une «incitation à détourner le regard» du travail des enfants. (ATS)