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Le coronavirus précipiterait l’oraison funèbre des bancomats

La pandémie pourrait mettre les distributeurs automatiques définitivement hors service. De nombreux Suisses se sont en effet détournés de l'argent liquide, selon le groupe SIX.

Une totale disparition de Suisse semble cependant exclue tant la population est traditionnellement attachée aux espèces, à la différence de région comme la Scandinavie où payer en liquide est devenu une pratique "exotique". (Keystone)
Une totale disparition de Suisse semble cependant exclue tant la population est traditionnellement attachée aux espèces, à la différence de région comme la Scandinavie où payer en liquide est devenu une pratique "exotique". (Keystone)
17 novembre 2020, 11h21
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Dirons-nous bientôt adieu aux bancomats? Le groupe financier SIX, qui fournit la plateforme et le logiciel des distributeurs automatiques du pays, a constaté une accélération des paiements par carte bancaire depuis la première vague pandémique du printemps. Ce désintérêt croissant pourrait entraîner la disparition d'un grand nombre d’appareils, en raison de coûts d'exploitation élevés. "En 2020, nous prévoyons une nouvelle baisse des retraits (d'espèces) de l'ordre de 20 à 25%", indique Julian Chan, porte-parole de SIX. L'année dernière, le recul avait atteint 10 à 15%, selon les statistiques de la société zurichoise. Les banques gardent un œil attentif sur la fréquentation des distributeurs automatiques, car elles engagent des frais importants pour proposer ce service. L'achat et l'installation d'un appareil coûte entre 40.000 et 90.000 francs, selon les fonctions retenues, affirme Andreas Dietrich, professeur à la Haute école de Lucerne, spécialisé dans les services financiers. La maintenance, la vidéosurveillance - voire la location du site - entraînent ensuite des charges annuelles allant de 15.000 à 40.000 francs. Tout ramener à la question des coûts reviendrait cependant à commettre une erreur, à en croire Andreas Dietrich. La présence d'un bancomat répond parfois à des impératifs stratégiques. Sur certains sites, les distributeurs sont utilisés à des fins de marketing ou constituent une marque de prestige. Malgré tout, les banques ne pourront pas se soustraire à une réflexion sur l'avenir de ces machines, dont l'utilisation n'a cessé de reculer au cours des cinq dernières années, souligne notre spécialiste. L'année 2015 a marqué un record, suivi d'un reflux. La pandémie n'a fait qu'accélérer la tendance baissière. Chaque transaction effectuée sur ces appareils coûte de plus en plus cher aux établissements. La disparition de certaines machines n'est cependant pas une fatalité, puisque les parades existent, selon Benjamin Manz, du comparateur en ligne Moneyland. Plusieurs banques pourraient par exemple exploiter un seul et même appareil. "Dans de nombreux villages, il y existe un distributeur de Raiffeisen, un de la banque cantonale et un pour chacune de grandes banques UBS et Credit Suisse qui ont fermé leur succursale depuis longtemps", note le spécialiste. Jusqu'à 40% d'appareils en moins Raiffeisen assure que le nombre de ses bancomats devrait rester stable dans les deux années à venir, malgré une recrudescence des paiements sans espèces et par téléphone portable. "La situation extraordinaire de ce printemps a renforcé la tendance", confirme la coopérative bancaire. Le groupe saint-gallois est le champion suisse des distributeurs, disposant du réseau le plus étoffé avec 1771 appareils. Le constat à la baisse est "fondamentalement" identique chez Postfinance, qui exploite un peu moins de 1000 bancomats. Pour Credit Suisse, la fréquentation sur le déclin - une contraction des transactions de 10% jusqu'ici - aura des conséquences à terme. La future conception du réseau de distributeurs de billets repose essentiellement sur la demande en argent liquide, rappelle le numéro deux bancaire helvétique. Aucune réduction n'est cependant prévue dans l'immédiat. Selon les statistiques de la Banque nationale suisse (BNS), la Suisse comptait près de 7000 bancomats à la fin du mois d'août. Le groupe SIX s'attend à une réduction de 30% à 40% dans les cinq prochaines années. La fermeture de succursales, autre tendance lourde dans le secteur bancaire, va également contribuer à la raréfaction de ces machines. Une totale disparition semble cependant exclue, les Suisses étant traditionnellement attachés aux espèces. Benjamin Manz relève qu'il y a un bancomat pour 1200 habitants, une proportion relativement élevée par rapport à d'autres pays. En Scandinavie, payer en liquide est devenu une pratique "exotique", selon lui. L'année dernière, près de 80 milliards de francs en billets de banque étaient en circulation en Suisse, un volume en constante augmentation au cours des cinq dernières années, à en croire la BNS. (AWP)