Les déconvenues se succèdent pour Credit Suisse, contrainte d'inscrire une provision pour litiges de 500 millions de francs au quatrième trimestre. Embourbée dans les affaires Archegos et Greensill, secouée par le départ du controversé président António Horta-Osório, la grande banque va subir une perte avant impôts de quelque 1,6 milliard de francs.
En publiant un avertissement sur résultats, le numéro deux bancaire helvétique confirme que les trois derniers mois de l'année seront toujours marqués au fer rouge des scandales. Le demi-milliard de provisions sera dévolu à "un certain nombre de cas" et concernent "principalement" des litiges dans l'activité de banque d'affaires, affirme le géant zurichois, sans toutefois entrer dans les détails.
Au troisième trimestre, Credit Suisse avait déjà provisionné 500 millions de francs pour des litiges.
Au premier semestre, la grande banque avait subi des pertes de plus de 5 milliards de francs suite à la débâcle du fonds spéculatif américain Archegos. Credit Suisse procède également à la liquidation des fonds Greensill, du nom de la société d'affacturage britannique en faillite. Jusqu'ici, les remboursements ont atteint près des deux tiers des 10 milliards de dollars placés par les investisseurs.
Les provisions constituées au quatrième trimestre seront partiellement compensées par 225 millions de francs de ventes immobilières. Une perte avant impôts d'environ 1,6 milliard de francs est attendue, en prenant compte de la dépréciation - annoncée en novembre - de 1,6 milliard pour un écart d'acquisition (goodwill) lié principalement au rachat de Donaldson, Lufkin & Jenrette en 2000.
Dans les activités opérationnelles, la division de banque d'affaires sera déficitaire au dernier partiel 2021. Credit Suisse s'efforce de redimensionner cette unité, notamment en abandonnant l'unité dévolue aux fonds spéculatifs, Prime Services, à l'origine de l'affaire Archegos. Le conseil d'administration et la direction souhaitent ainsi réduire l'exposition au risque de l'établissement.
A 10h47, l'action Credit Suisse perdait 0,1% à 8,266 francs
Reflux dans la gestion de fortune
Activité stratégique du groupe, la gestion de fortune a pâti d'un ralentissement dans les deux divisions - bientôt fusionnées - Wealth Management et Asia Pacific, cette dernière ayant souffert de conditions de marché difficiles. Un "modeste" reflux d'argent frais est à attendre pour le quatrième trimestre. Ces sorties seront plus que compensées par la collecte dans la gestion d'actifs, précise le communiqué.
Une des rares nouvelles positives annoncées mardi par Credit Suisse est à chercher du côté de la capitalisation. L'objectif de ratio de fonds propres durs (CET1) de 14% a été dépassé pour 2021. Le ratio de levier devrait quant à lui être supérieur à 6%.
Les états financiers complets du 4e trimestre et de l'exercice 2021 seront dévoilés le 10 février.
Les analystes semblaient accueillir cette énième série de mauvaises nouvelles sans surprise aucune. Pour la Banque cantonale de Zurich, la liquidation de l'héritage toxique de la banque d'affaires de Credit Suisse risque de s'éterniser. Vontobel constate que les résultats sont inférieurs aux attentes.
Les investisseurs se montraient davantage contrariés face à ces annonces peu engageantes. A 10h47, l'action Credit Suisse perdait 0,1% à 8,266 francs, après avoir touché un plancher pluriannuel à 8,15 francs en début de séance. Le titre a cédé presque 9% depuis janvier et plus de 22% l'année dernière. Malgré cette chute du cours, le consensus des analystes ne recommande toujours pas d'acheter le titre, préférant un positionnement neutre.
L'exercice 2021 restera comme un annus horribilis pour la banque aux deux voiles, qui a vu de multiples affaires éclater, entachant clairement sa réputation.
Dernier scandale en date, la démission du président António Horta-Osório après huit mois. Le Portugais, qui devait redresser Credit Suisse, a contrevenu à plusieurs reprises aux règles de quarantaine mises en place pour lutter contre le coronavirus. Il a été remplacé par Axel Lehmann. (AWP)
Une activité intense de fusions-acquisitions en 2022
L'unité de banque d'affaires de Credit Suisse s'attend à voir se poursuivre la robuste dynamique de fusions et acquisitions d'entreprises cette année, en particulier dans l'industrie pharmaceutique, qui dispose de liquidités abondantes pour financer de nouvelles transactions.
L'exercice 2021 a été faste à l'échelle mondiale dans le domaine des fusions-acquisitions (M&A), a déclaré mardi Jens Haas, à la tête de la banque d'investissement de Credit Suisse, à l'occasion d'une visioconférence.
Dopées par la valorisation élevée des marchés boursiers et par des effets de rattrapage après un exercice 2020 marquée par l'éclatement de la crise sanitaire, les transactions ont atteint des niveaux record par rapport aux années précédentes.
Le dynamisme de la seconde moitié de 2021 laisse donc présager de bonnes choses pour l'année en cours, estime le dirigeant. Il prévient cependant que le contexte de 2022 risque d'être plus compliqué en raison des incertitudes liées à l'évolution des taux d'intérêt. La poursuite du recentrage des groupes sur leur coeur de métier devrait être au centre des débats.
En ce qui concerne les différents secteurs, le banquier d'affaires de Credit Suisse voit du potentiel élevé de transactions avant tout dans l'industrie pharmaceutique.
Selon les experts de la banque aux deux voiles, les entreprises de la branche disposent à l'échelle mondiale de quelque 2000 milliards de dollars pour procéder à d'éventuelles acquisitions, des programmes d'intéressement ou autres.
La volatilité actuelle du marché ne doit pas être surestimée à longue échéance, a ajouté M. Haas. Selon lui, elle doit être considérée au regard des années précédentes et ne devrait pas avoir une influence majeure sur le marché M&A. (AWP)