Les avoirs des assurés actifs et des pensionnés sont investis ensemble dans les caisses de pension. Dans une logique d’égalité de traitement, et sur le long terme, la rémunération offerte à chacun devrait être équitable.
A l’époque, tout était simple. Les réserves mathématiques étaient calculées avec un taux d’intérêt technique de 4%. Les taux de conversion correspondaient à une promesse d’intérêt d’environ 4% et les comptes d’épargne des assurés actifs étaient rémunérés à 4%. Si les rendements dépassaient 4%, les conseils de fondation pouvaient accorder un intérêt supplémentaire aux actifs et une revalorisation des rentes aux pensionnés dans une mesure équitable.
Ensuite est survenue la longue baisse des taux d’intérêt. Afin de maintenir la pérennité des institutions de prévoyance, les performances excédentaires ont été le plus souvent utilisées pour renforcer les réserves mathématiques afin de garantir les rentes et constituer des réserves de fluctuation de valeur afin de se mettre à l’abri des variations des marchés financiers. Les taux de conversion pour le calcul des nouvelles rentes n’ont été que partiellement adaptés à l’environnement de taux bas. Le taux de conversion minimum LPP de 6,8% correspond entre-temps à une promesse d’intérêt de plus de 4,5%, gains de longévité obligent. Dans les caisses de pension qui ont réduit leur taux de conversion réglementaire, la promesse d’intérêt reste le plus souvent supérieure à 2,5%.
Les cotisants subissent depuis 2021 un phénomène qui ne s’était plus produit depuis 1990: un intérêt réel négatif. Le tiers cotisant n’est plus
Brenda Duruz-McEvoy
Du côté des assurés actifs, le taux d’intérêt minimum LPP stagne à 1% depuis 2017. Plus une caisse de pension est proche du minimum LPP et plus les intérêts accordés aux actifs s’éloignent des intérêts promis aux rentiers, allant du simple au quadruple. Un déséquilibre inéquitable est apparu au détriment des assurés actifs. Ce sont pourtant eux qui portent le risque d’assainissement puisque les pensionnés bénéficient d’une garantie nominale de leur rente au titre de droits acquis.
Les performances 2023 jusqu’ici ne laissent présager d’aucune folie distributive. A l’heure où certains réclameront tout de même une indexation de leur rente, il faudra rappeler que ceux qui ont bénéficié d’une rémunération supérieure à l’inflation ces dernières années ne sont pas les assurés actifs. Au contraire, les cotisants subissent depuis 2021 un phénomène qui ne s’était plus produit depuis 1990: un intérêt réel négatif. Le tiers cotisant n’est plus.
L’évolution de l’épargne vieillesse doit néanmoins être considérée sur le long terme et ce phénomène, s’il reste passager, ne devrait pas susciter une inquiétude démesurée. Depuis l’introduction de la LPP, les taux d’intérêt minimum LPP composés ont atteint le double de l’inflation. Lorsque les rendements reviendront, il sera donc impératif de rémunérer correctement l’épargne, soit avec un intérêt similaire à celui accordé aux rentiers. Ainsi, le tiers cotisant pourra pleinement jouer son rôle pour les actifs d’aujourd’hui… comme il l’avait fait pour les seniors actuellement à la retraite.