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Pourquoi Genève peine à attirer des entrepreneurs pur-sang

Nombre de villes ont des atouts similaires mais, à Genève, la fiscalité des personnes physiques est un sérieux désavantage. La votation sur l'initiative 185 sur les grandes fortunes ne va rien arranger.

«L'impôt sur la fortune d’environ 1% à Genève (record national), contre 0,65% à Zurich. Aec 0,25%, les cantons de Zoug et de Schwyz sont nettement plus compétitifs.»
KEYSTONE
«L'impôt sur la fortune d’environ 1% à Genève (record national), contre 0,65% à Zurich. Aec 0,25%, les cantons de Zoug et de Schwyz sont nettement plus compétitifs.»
Philippe D. Monnier
Entrepreneur et administrateur
04 mai 2023, 15h00
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Chaque semaine, au moins un entrepreneur étranger me contacte pour me poser la question suivante: est-ce une bonne idée d’établir un siège mondial en Suisse? Et dans l’affirmative, quelle ville serait la plus appropriée?

J’admire ces entrepreneurs pur-sang. Ils ont fondé ou développé leur société internationale de plusieurs centaines ou milliers d’employés à la force du poignet. Pendant une vingtaine d’années, ils ont travaillé d’arrache-pied dans des pays dénués des atouts économiques de la Suisse. Et ils ont réuni un trésor de guerre suffisamment important pour pouvoir investir dans un siège en Suisse et ils envisagent maintenant de passer à la vitesse supérieure de leur développement international. En plus, ils souhaitent résider en Suisse pour offrir une éducation de qualité à leurs enfants.

Ces entrepreneurs me font penser à Peter Spuhler de Stadler Rail. Et ils me rappellent aussi que de nombreux fleurons suisses (Nestlé, Rolex, ABB, etc.) ont été créés par des étrangers. En plus, des pans entiers de l’économie suisse ont été «importés»: la banque privée, l’industrie horlogère, le négoce…

Choisir un lieu d’implantation en Suisse est à la fois facile et difficile car la majorité des grands atouts suisses (stabilité, droit du travail, main-d’œuvre…) sont les mêmes sur tout le territoire national. En outre, les centres de compétences (EPFL, EPFZ, fournisseurs qualifiés…) sont prêts à collaborer avec n’importe quelle société en Suisse tellement les distances intervilles sont réduites.

Quant à la fiscalité des entreprises, elle est devenue un facteur de différentiation moins important car beaucoup de cantons attractifs offrent des taux d’imposition sur le profit compris entre 11% et 14%, même si Zurich se permet encore un taux supérieur à 19%.

En revanche, ce qui varie beaucoup d’une ville à l’autre, c’est la fiscalité des personnes physiques, en particulier l’impôt sur la fortune, une spécificité suisse. Malgré la possibilité de boucliers fiscaux, les entrepreneurs détestent cet impôt car il affecte les possibilités d’investir dans l’outil de travail. Cet impôt dépend bien sûr de la fortune mais il est d’environ 1% à Genève (record national) et à peine plus bas en terres vaudoises; Zurich est à environ 0,65% mais, avec 0,25%, les cantons de Zoug et de Schwyz sont nettement plus compétitifs.

Presque tous ces entrepreneurs étrangers finissent par choisir Zurich ou Zoug pour le siège de leur entreprise.

Philippe D. Monnier

En fin de compte, presque tous ces entrepreneurs étrangers finissent par choisir Zurich ou Zoug pour le siège de leur entreprise (avec une importante création d’emploi à la clé) ainsi que Zoug ou Schwyz pour leur lieu de résidence. Comme ces entrepreneurs ne sont pas férus d’interventions étatiques, ces implantations apparaissent rarement dans les statistiques officielles des services de promotion économique.

Tout cela me paraît regrettable pour notre région lémanique. Ce qui est sûr, c’est que la votation genevoise IN 185 du 18 juin 2023 («pour une contribution temporaire de solidarité sur les grandes fortunes») n’améliorera pas cette situation.