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Monitorer l’évolution des besoins en médecine

Véronique Kämpfen
FER Genève - Directrice de la communication
26 novembre 2020, 14h44
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Cette semaine, une initiative intercantonale en faveur de la formation des médecins a vu le jour. Elle s’appelle Réformer, pour RÉorganisation de la FORmation post-graduée en MEdecine en Suisse Romande. Son but: «produire des indicateurs sur la formation post-graduée et la démographie médicale, réguler et répartir les places de formation entre les différents établissements formateurs en Suisse romande, orienter les médecins en formation dans les disciplines en fonction des besoins [de la population]». En lisant de manière critique le communiqué de presse, on peut se demander si les médecins sont si mal orientés qu’il faille les prendre par la main pour leur dire quelle spécialité exercer. Ou serait-ce parce qu’il manque des médecins dans certaines disciplines et qu’il faudrait donc ouvrir l’accès à la formation uniquement dans ces domaines et non dans d’autres? Les deux hypothèses sont sujettes à caution, sous-entendant qu’un jeune étudiant en médecine ne pourrait plus, in fine, choisir la spécialité qui le passionne, mais qu’il devra s’orienter là où il y a de la place. On entend souvent parler de pénurie de médecins programmée à cause du nombre de praticiens qui partent à la retraite, du peu d’étudiants en médecine et de la féminisation de la profession, qui induirait davantage de temps partiels. De combien de médecins manquants parlons-nous? Selon Jürg Schlup, président de la FMH, la Confédération avait annoncé en 2011 que 1300 nouveaux médecins formés en Suisse suffiraient à faire face à la pénurie. L’année passée, cet objectif a quasiment été atteint. Bonne nouvelle, me direz-vous? Oui, sauf que dans la même année, 2940 médecins étrangers ont reçu une reconnaissance de leur diplôme pour pouvoir exercer en Suisse. Les calculs de la Confédération sont donc à prendre avec des pincettes. Voulons-nous continuer à importer deux tiers des besoins en médecins de la Suisse – les cyniques parmi nous se réjouiront que la Confédération ne prenne pas en charge leurs coûts de formation – ou préférons-nous miser sur la relève indigène, évitant ainsi de contribuer à la création de déserts médicaux dans certaines régions des pays limitrophes? La question est épineuse et doit faire l’objet de toutes les attentions. Pénurie de personnel soignant La pénurie de personnel soignant touche aussi le personnel infirmier, les aides-soignants et d’autres métiers qui gravitent autour des soins à la personne. Ces professions sont appelées à se développer ces prochaines années, notamment en raison du vieillissement de la population. A ce titre, une motion intéressante est proposée au Grand Conseil genevois, qui vise à mettre en place un plan de transition professionnel, notamment pour les acteurs de secteurs gravement touchés par les conséquences économiques du coronavirus, comme l’hôtellerie, la restauration, les transports et le tourisme, vers les métiers de la santé et des soins. Pour accompagner cette transition, un pôle de formation de transition professionnelle «santé – soins» serait créé. L’initiative Réformer sera intéressante à suivre, notamment du fait des indicateurs qu’elle produira pourLa question du manque de médecins dans certaines régions, et notamment de généralistes, sera certainement traitée. Néanmoins, même avec les données les plus complètes qui soient, il est difficile de prédire l’avenir dans ce domaine, tant les paramètres sont nombreux et l’imprévu présent. Jürg Schlup l’écrit avec ironie dans le dernier Bulletin des médecins suisses: «Alors qu’il peine actuellement pour prévoir le taux d’occupation des lits de réanimation dans les cinq prochains jours, le Conseil fédéral affirme pouvoir prédire les coûts de la santé dans deux ans, en les détaillant par secteur de soins et par cantons». Au vu de cette difficulté objective, le plus important est encore de laisser le libre choix d’une profession à celles et ceux motivés pour l’exercer, tout en mettant en place les conditions cadre les plus favorables pour développer de nouvelles vocations, et non pas les freiner. Nous aurons cruellement besoin de ces ressources ces prochaines années; ne coupons pas la motivation des personnes qui nous soigneront demain. * Directrice de la communication, FER Genève