Le droit de la concurrence constitue un élément important de tout régime économique qui allie liberté et responsabilité. Ces dernières années, ce domaine du droit est confronté à des enjeux fondamentaux renforcés par la numérisation de l’économie, la transformation des modèles de distribution et, aujourd’hui, la crise du Covid-19.Cette année 2020 est une année particulière – et difficile – pour beaucoup d’entreprises mais aussi de particuliers.
L’impact néfaste sur les entreprises
Les mesures sanitaires, rendues nécessaires pour essayer de protéger la population, ont un impact néfaste sur les entreprises. Parallèlement, la pandémie a aussi accéléré la numérisation de l’économie et la mutation déjà avancée des marchés ou de la production.La crise Covid-19 a des effets sur l’organisation des marchés et peut favoriser des coordinations potentielles et les échanges d’informations entre entreprises, par exemple pour le développement d’un vaccin, pour coordonner les approvisionnements de certains produits face à la pénurie ou pour planifier les capacités face à une demande accrue.
Le droit des cartels maintenu
En Suisse, la Commission de la concurrence (COMCO) a clairement rappelé que le droit des cartels s’applique également durant la crise du coronavirus, ce qui lui a valu d’être critiquée pour son inaction, par rapport à l’UE. La problématique, juridique au départ, est ainsi devenue politique et économique. De son côté, la Commission européenne a temporairement assoupli la réglementation pour atténuer la crise. Ainsi, la coopération entre entreprises peut être jugée efficace pour remédier aux pénuries de biens et services essentiels et la Commission européenne a introduit la procédure de «Comfort Letter» sur la légalité des initiatives concrètes de coopération. Il est à noter que la situation en Suisse est un peu différente, dans la mesure où notre pays connaissait déjà, avant même la crise Covid-19, un tel système permettant aux entreprises qui souhaitent coopérer de demander l’aval de la COMCO sous forme de consultations et de procédures d’opposition.Ensuite, l’essor d’internet et des ventes en ligne bouleverse les comportements et soulève nombre de questions, par exemple en matière de publicité ou de géoblocage, sans oublier les algorithmes dont on subit les choix via les moteurs de recherche. Les marchés se décloisonnent, deviennent plus transparents tandis que la liberté des consommateurs s’accroît de même que leurs exigences. Les modèles de distribution évoluent, de plus en plus de fabricants vendent en ligne, devenant ainsi concurrents de leurs distributeurs.
Mener des procédures pilotes
Des évolutions importantes à suivre donc et que les PME ne peuvent ignorer. Dès lors, une réflexion s’impose sur la refonte de certaines règles dans l’objectif de garantir aux entreprises la liberté d’organiser de façon optimale leurs modèles de distribution. De grandes révisions législatives ne sont toutefois pas forcément nécessaires pour affronter ces nouvelles réalités, une adaptation de la LCart pouvant suffire. Des procédures pilotes pourraient par exemple être menées. Il faudrait parfois aussi que les entreprises osent tout simplement faire valoir leurs droits envers leurs fournisseurs. Les moyens (notamment de droit civil) sont là, il s’agit de les utiliser.* Secrétaire patronale Centre Patronal