Dans le cadre de litiges avec des entreprises, Berne entend introduire l’exercice collectif des droits. Alors que des solutions existent déjà, cette mesure ne ferait qu’ouvrir la boîte de Pandore à tous les abus.
S’inscrivant dans le cadre de la révision du code de procédure civile, le Conseil fédéral prévoit que l’action de groupe existante pour les organisations puisse désormais servir également pour des actions en dommages et intérêts. Les actions collectives seraient mises en œuvre de manière intersectorielle et donc disponibles dans tous les domaines du droit. Cette possibilité serait également offerte aux organisations étrangères. Si un tel projet venait à voir le jour, n’importe quelle entreprise suisse serait confrontée à des risques majeurs en matière de responsabilité.
Notre pays se retrouverait alors sous le feu des projecteurs d’une habile industrie des litiges, très active au niveau international et qui lorgne sur le potentiel du marché de la plainte en Suisse. L’expérience à l’étranger nous montre que les entreprises visées par des prétentions élevées dans des procédures civiles sont exposées à des années d’incertitudes: obligation de constituer des réserves, inquiétude des investisseurs, importants coûts de défense, etc. Face au spectre d’une procédure judiciaire trop longue et onéreuse, les entreprises sont contraintes de céder au chantage à conclure un arrangement financier en leur défaveur et pouvant se chiffrer en milliards.
Au lieu d’expérimenter de nouvelles voies de droit périlleuses, nous ferions mieux de compter sur les instruments déjà existants.
Arnaud Midez
Aux Etats-Unis, berceau des actions collectives, nombre de producteurs se voient ainsi attaquer en justice pour des motifs abracadabrants: excès de glace dans le café glacé pour les uns, teneurs insuffisantes en oignons dans les chips pour les autres, cet instrument a ouvert - en grand - la porte aux actions judiciaires abusives.
Pour les consommateurs, cela peut sembler avantageux de prime abord, car il apparaît soudain possible d’obtenir plus facilement des dédommagements aux préjudices subis. En réalité, ils ne retirent souvent rien ou presque. En cas de litige et pour le plus grand profit d’une poignée d’avocats, cet instrument conduit à l’émergence d’un juteux business de la plainte, préjudiciable pour toutes les parties concernées. En définitive, ce sont bel et bien les consommateurs qui sont les grands perdants, car les entreprises répercutent les coûts et les risques sur le prix des produits.
En somme et c’est bien là le revers de la médaille, les actions collectives ne résolvent aucun problème, mais en créent de nouveaux. Outre le fait que nous jetterions en pâture nos tribunaux, nous découragerions le développement de nos entreprises, pour qui, les actions collectives pourraient constituer une menace existentielle. Au lieu d’expérimenter de nouvelles voies de droit périlleuses, nous ferions mieux de compter sur les instruments déjà existants. Les procédures de médiation ou la cession de créance qui permet le regroupement des prétentions contre un ou une responsable sont autant de solutions offertes par notre droit et qu’il convient de mieux utiliser.