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Votations sur l'aide aux médias: les arguments des comités sous la loupe

Gaspillage d'argent ou protection de la diversité des médias, tour d'horizon des arguments avancés par le Conseil fédéral, le comité référendaire ainsi que l'association des éditeurs alémaniques Schweizer Medien.

Le paquet d'aide crée notamment une aide aux médias en ligne, dotée de 30 millions de francs par an, et visant à favoriser la transition numérique.
Keystone
Le paquet d'aide crée notamment une aide aux médias en ligne, dotée de 30 millions de francs par an, et visant à favoriser la transition numérique.
05 janvier 2022, 11h17
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Le comité référendaire dénonce un "gaspillage d'argent"

Le paquet d'aide aux médias, soumis le 13 février au peuple, est un "gaspillage d'argent". Le comité référendaire dénonce mercredi un financement inutile et nuisible à la démocratie. Les médias subventionnés sont sous contrôle, assure-t-il. "Les subventions excessives rendent les médias dépendants du pouvoir politique", affirme le comité "Non aux médias contrôlés" dans la brochure de votation. Elles les décrédibilisent et les empêchent de jouer leur rôle de quatrième pouvoir. "Ce ne sont plus les médias qui surveillent l’État, mais l’État qui surveille les médias."

Les opposants estiment de nouvelles subventions inadéquates et même superflues. Les quatre grands groupes de presse ont gagné près de 300 millions de francs en 2020, lors de la pandémie, relèvent-ils. Et d'assurer que les petits éditeurs se portent aussi bien.

Seuls les médias privés sont mieux soutenus, continuent-ils. Les médias gratuits ne reçoivent rien. C'est une source de discrimination et d'inégalité sociale, à leurs yeux. Les personnes à revenu moyen ou les jeunes, qui ne peuvent pas s'abonner à un journal, ne pourront se former une opinion politique, estiment-ils.

Le Conseil fédéral veut assurer la diversité médiatique

Pour le Conseil fédéral, c'est tout le contraire. Le paquet d'aide permettra de renforcer la diversité médiatique et d'assurer que les habitants de toutes les régions pourront rester informés. Il compensera en partie la diminution des recettes publicitaires, largement tombée dans l'escarcelle des géants d'Internet comme Google ou Facebook, ainsi que la baisse des ventes d'abonnement.

L'indépendance des médias n'est aucunement remise en cause, selon le gouvernement. Le projet s'appuie sur des instruments éprouvés et en place depuis longtemps. Il propose entre autres d'étendre l'aide indirecte à la presse en soutenant à l'avenir également la distribution matinale des journaux. Une enveloppe de 120 millions est prévue pour ce volet. 120 millions est prévue pour ce volet.

De quoi parle-t-on?

Le train de mesures en faveur des médias, qui fait l'objet d'un référendum, prévoit une hausse des aides de 151 millions de francs par an par rapport au régime actuel. L'aide à la distribution des journaux et magazines - 170 en profiteraient - représente la part du lion. Celle-ci passerait à 120 millions de francs par année, soit une augmentation de 70 millions par rapport au système en vigueur actuellement.

Le paquet crée également une aide aux médias en ligne, dotée de 30 millions de francs par an, et visant à favoriser la transition numérique. Une aide est aussi prévue pour les agences de presse, les écoles de journalisme ou encore le Conseil suisse de la presse.

Schweizer Medien juge ces mesures "existentielles"

Le train de mesures en faveur des médias soumis en votation le 13 février est d'une importance existentielle pour la branche, a affirmé mercredi le président de l'association des éditeurs alémaniques Schweizer Medien (VSM), Pietro Supino. Il s'agit principalement d'une aide indirecte et l'indépendance des rédactions n'est pas menacée, a-t-il assuré.

"L'accent (du paquet de mesures) réside dans le renforcement de l'aide indirecte, qui a fait ses preuves", a déclaré Pietro Supino, également président de TX Group. Il s'exprimait à l'occasion de la traditionnelle réunion de l'Epiphanie du VSM, qui s'est tenue pour la deuxième fois consécutive de manière virtuelle, pandémie oblige.

Modèle économique menacé

"Cette extension est nécessaire. Avec la baisse des tirages des titres imprimés, les coûts de distribution pour chaque exemplaire augmentent". Cette hausse menace le modèle économique des journaux, dont le rôle reste très important pour la formation de l'opinion dans un pays fédéral comme la Suisse, a insisté Pietro Supino.

Alors que les éditeurs s'étaient surtout battus pour une hausse de l'aide à la distribution des journaux, en particulier pour que ces derniers arrivent tôt le matin dans les boîtes aux lettres, un volet d'aide directe pour les médias en ligne est notamment venu compléter le paquet lors du processus politique.

"Dans ce cadre, on a veillé à ce que l'indépendance des rédactions soit garantie", a souligné Pietro Supino. L'association des éditeurs a ainsi plaidé pour que ce soutien soit lié aux recettes des abonnements en ligne. "C'est donc le public qui décide quels médias seront subventionnés. Les rédactions resteront indépendantes de l'Etat", a assuré le président du VSM.

Le train de mesures en faveur des médias prévoit une hausse des aides de 151 millions de francs par an par rapport au régime actuel.
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Le train de mesures en faveur des médias prévoit une hausse des aides de 151 millions de francs par an par rapport au régime actuel.

Google et Facebook à la caisse

Le train de mesures en faveur des médias est nécessaire, mais il ne suffira pas à assurer à lui seul l'avenir du secteur, selon Pietro Supino. Ce dernier a une nouvelle fois plaidé pour l'introduction en Suisse d'un droit voisin permettant aux entreprises de médias de réclamer des dédommagements aux géants de l'internet comme Google et Facebook pour les contenus que ces derniers reprennent.

"Sans droit voisin, il ne pourra plus y avoir à long terme en Suisse de médias privés indépendants", a affirmé Pietro Supino. Une fois le vote du 13 février passé, la branche se lancera résolument dans ce nouveau dossier, a fait savoir le président du VSM.

La doléance des éditeurs a déjà été entendue par le Conseil fédéral. Ce dernier a annoncé le 17 décembre dernier sa volonté de réglementer la question du droit voisin en Suisse. Un avant-projet de loi doit être élaboré d'ici à la fin de 2022.

Les droits voisins, comparables aux droits d'auteur, sont explicitement prévus par une nouvelle législation européenne adoptée en 2019. Celle-ci a été ensuite transposée dans d'autres pays, comme la France. Récemment, Google a conclu des accords avec l'AFP ou plusieurs grands éditeurs allemands. Le Figaro a pour sa part annoncé un accord avec Facebook.