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Le congé paternité ne fait pas que des heureux: des entreprises craignent pour leur productivité

Les secteurs employant beaucoup de main-d’œuvre masculine redoutent notamment des conséquences sur les investissements et sur l’emploi.

Dès janvier, les pères auront droit à dix jours de congé paternité. (Keystone)
Dès janvier, les pères auront droit à dix jours de congé paternité. (Keystone)
27 septembre 2020, 20h38
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Tous les pères auront droit à dix jours de congé à la naissance de leur enfant dès l’an prochain, contre un actuellement. Les Suisses ont accepté dimanche un changement de loi en ce sens à 60%. «Nous sommes très heureux que l’on puisse, à l’avenir, obtenir plus de temps libre pour commencer une vie de famille que pour déménager», réagit Adrian Wüthrich, président du comité national soutenant cette mesure. Les futurs papas pourront prendre ce congé en un seul bloc ou de manière fractionnée durant les six mois qui suivent la naissance de leur bébé. Ce congé sera pris en charge par les allocations pour perte de gain (APG) financées conjointement par l’employeur et l’employé. Il nécessite un relèvement de 0,05% de ces cotisations. La compensation pour la perte du revenu sera de 80% du salaire précédent. L'indemnité ne pourra toutefois pas excéder 196 francs par jour.

Augmenter l’activité des femmes

Le coût total de ce nouveau congé est difficile à estimer puisqu’il dépend du nombre d’enfants à naître. Durant la campagne, le Conseil fédéral l’a chiffré à 230 millions de francs par an. Trop selon ses partisans qui ont articulé un montant de 64 millions à charge des entreprises. Pour la Fédération des entreprises romandes (FER) à Genève, ce congé s’avère économiquement supportable. «Le vote de dimanche se trouve d’ailleurs en cohérence avec une vision moderne de la société, qui correspond aux aspirations des jeunes générations», écrit l’organisation patronale. Favorable à cette nouvelle loi, la FER espère désormais qu’elle participera à une meilleure intégration des femmes sur le marché du travail.

Vers un congé parental

Selon Travail.Suisse, le congé paternité représente en effet un petit pas en faveur des femmes. En ces temps de pénurie de personnel qualifié, «des conditions-cadre et un financement doivent être mis en place pour augmenter l’activité des femmes. La conciliation entre la vie professionnelle et privée doit être améliorée», estime Adrian Wüthrich qui est aussi président de Travail.Suisse. Dans ce contexte, l’organisation faîtière des travailleurs plaide pour un congé parental. Un tel congé sera mis en place dans tous les pays de l’Union européenne (UE) d’ici mi-2022. Les branches employant beaucoup de personnel masculin se montrent elles plus circonspectes au sujet de ce congé paternité. Si elles saluent le fait de mettre toutes les entreprises sur le même pied d’égalité, elles craignent pour l’emploi. «Les PME, respectivement les salariés, seront pénalisés car il s'agit bien d'une ponction supplémentaire du salaire via les charges sociales», déplore Cédric Cagnazzo, président de la Société des entrepreneurs suisses en échafaudages (SESE). Son secteur d’activité n’emploie que trois femmes. «La productivité des entreprises baisseront encore: d'un côté, les revenus diminués des charges sociales ne seront pas investis dans l'outil de production, de l’autre, les travailleurs absents ne seront soit pas remplacés, soit remplacés par une main-d'œuvre temporaire moins expérimentée», ajoute Cédric Cagnazzo.

Inquiétudes pour l’emploi

De son côté, Swissmem aurait souhaité que le congé paternité continue à être réglé au niveau des entreprises et des branches. Plusieurs conventions collectives de travail (CCT) se sont en effet dotées d’un congé plus généreux que celui prévu dans la loi actuelle. Au vu de la situation économique difficile des groupes industriels en lien avec la Covid-19, l’organisation faîtière des machines, des équipements électriques et des métaux exige qu’il soit renoncé à une plus ample extension des prestations sociales et à une augmentation des coûts salariaux. Membre du comité de l’Union suisse des arts et métiers (Usam) Olivier Mark constate lui que 40% des Suisses ont refusé le congé paternité. «Notre message à savoir des craintes pour l’emploi et une perte de rentabilité pour les PME a donc été entendu». Un autre message concernant la politique familiale n’a lui pas été entendu par le peuple. Les Suisses ont en effet balayé dimanche à 63% une proposition du Parlement pour diminuer l’imposition de certaines familles (déduction fiscale fédérale des frais de garde).