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L’accord-cadre institutionnel revient sur le devant de la scène européenne

Suisse-UE. Le Conseil fédéral avait mis en suspens ce dossier jusqu’à la votation sur l’initiative de limitation. Les prises de position ce dimanche rappellent que la situation est délicate.

A Davos, responsables européen et suisse s’étaient rencontrés, sans faire avancer l’accord cadre.
A Davos, responsables européen et suisse s’étaient rencontrés, sans faire avancer l’accord cadre.
27 septembre 2020, 20h45
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Le net rejet dimanche de l’initiative de limitation par le peuple suisse confirme la voie bilatérale choisie après le refus de l’Espace économique européen en 1992. Ce résultat devrait aussi marquer la fin des attaques contre les accords bilatéraux liés entre eux par une clause guillotine. La directrice de la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie, Claudine Amstein, se réjouit qu’«enfin, les entreprises peuvent avoir de la visibilité sur ce dossier, après cette période d’initiatives récurrentes. Les Suisses ont souligné qu’ils sont favorables à la libre circulation des personnes. Nous pouvons continuer sur la voie bilatérale.» L’associé-gérant senior de Lombard Odier, Patrick Odier, rappelle que, avec cette initiative, «la menace de mettre un terme aux bilatérales était plus réelle que jamais.» Mais le conseiller national UDC Jean-Luc Addor, partisan de l’initiative, constate que «la peur a changé de camp. Une fois de plus, la peur a joué avec succès.» Les partenaires sociaux doivent s’entendre Le débat européen a cependant déjé repris. Dans la NZZ,  un peu plus d’une semaine avant la votation, l’ancien conseiller fédéral Johann Schneider-Ammann a émis des réserves sur l’accord-cadre institutionnel. La fuite vendredi du résultat négatif des négociations entre les partenaires sociaux à ce sujet, sous forme d’une lettre au Conseil fédéral, le confirme. Tant Johann Schneider-Ammann que les partenaires sociaux estiment que, en l’état, l’accord-cadre ne peut pas passer la rampe lors d’une votation. La Suisse doit obtenir des progrès sur les trois dossiers litigieux: la directive relative aux droits des citoyens de l’Union européenne, la protection salariale et la reprise du droit européen, avec la question du tribunal arbitral en cas de conflits. «Les partenaires sociaux doivent désormais trouver une solution unie, soutient Darius Farman du think tank de politique étrangère Foraus. Et cette solution doit être défendue à Bruxelles.» L’Union patronale suisse «a convenu avec les partenaires sociaux de maintenir le niveau actuel de protection des employés», a-t-elle souligné. Jean-Luc Addor a lui aussi des attentes par rapport à cette période, soulignant le oui des Tessinois à l’initiative de limitation «car ils ont vu que la situation était grave sur le plan des frontaliers. Comment défendre les intérêts des travailleurs installés en Suisse et leur salaire? Ce sont les prochains enjeux de l’accord-cadre.» En cas de retard, Darius Farman de Foraus redoute toutefois des mesures de rétorsion, par exemple si l’accord sur les dispositifs médicaux devenait caduc: «Cela obligerait les entreprises exportatrices à procéder à une double certification de leurs produits.»  La directrice de la CVCI est plus conciliante: «Nous sommes favorables à l’accord-cadre institutionnel. Ce que nous demandons du Conseil fédéral, ce sont des clarifications sur les points litigieux, mais pas une renégociation. Par rapport à notre première prise de position sur l’accord-cadre, nous constatons que les choses sont restées en stand-by, le texte est resté le même.» L’UE plus souple? Certains misent sur le besoin de l’UE d’un résultat positif avec la Suisse dans le contexte du Brexit. Claudine Amstein n’y croit pas du tout: «Je ne suis pas sûre qu’il y ait une fenêtre d’opportunité. Dans le cadre du Brexit, l’UE a surtout fait preuve de sa volonté de rester ferme. Cela implique qu’elle ne peut pas accorder de nouvelles concessions à des pays tiers. Au stade actuel, en cas de renégociations, il faudrait donc plutôt s’attendre à un scénario inverse.» Pour Patrick Odier, il est grand temps d’avancer dans ce dossier: «Le Conseil fédéral s’était prononcé pour une mise à jour des accords bilatéraux qui commencent à dater. Il ne s’agit même pas de les améliorer, mais de les maintenir aussi efficaces qu’ils étaient. Bien entendu qu’il doit obtenir des précisions, mais certaines sont difficiles à formaliser dans un texte d’accord. Après l’accord-cadre, nous avons toujours le loisir de négocier.» Cinq ans de négociations La question du tribunal arbitral fait pourtant partie de l’accord-cadre. L’idée d’un tribunal étranger imposant ses sentences à la Suisse doit être corrigée. «Le tribunal arbitral n’enlève en rien la capacité de la Suisse de refuser une décision qui ne lui convient pas. Je rappelle qu’après des négociations de près de cinq ans, le Conseil fédéral en était à bout touchant. Il faut maintenant avancer et éviter de prendre du retard», insiste Patrick Odier. Il faut clarifier des points à l’intérieur de la Suisse pour arriver à une adoption rapide de l’accord-cadre. «Un rapprochement politique avec l’UE n’est clairement pas à l’ordre du jour. Ce sont des accords commerciaux qui sont en jeu. Mais ce n’est pas qu’un enjeu économique. C’est une question de bien-être. Culturellement et géographiquement, l’Europe est notre partenaire naturel. Le confinement a également mis en évidence l’importance d’une organisation régionale des chaînes d’approvisionnement, ainsi que du maintien des relations au sein d’une économie régionale qui ne s’arrête pas aux frontières nationales.  Du point de vue de la durabilité aussi, il faut œuvrer en faveur d’une régionalisation de nos économies», conclut Patrick Odier. Collaboration: Maude Bonvin