• Vanguard
  • Changenligne
  • FMP
  • Rent Swiss
  • Gaël Saillen
S'abonner
Publicité

François Hollande: «Le rôle du politique n'est pas de tout interdire»

Invité au Swiss economic forum, François Hollande livre son diagnostique sur la pandémie de Covid-19. L'ancien président de la France parle aussi du populisme, de l'Europe et de ce qu'il trouve de remarquable en Suisse.

"La Suisse peut aussi être motrice parce qu’elle a une conception active de la neutralité." (Keystone)
"La Suisse peut aussi être motrice parce qu’elle a une conception active de la neutralité." (Keystone)
Frédéric Lelièvre
CEO et Rédacteur en chef - L'Agefi
01 septembre 2020, 19h34
Partager
François Hollande sera l’un des invités vedettes du Swiss Economic Forum. L’événement, dont L’Agefi est l’un des partenaires médias, se tient ce mercredi 2 et demain jeudi 3 septembre à Montreux. Président de la France entre 2012 et 2017, le socialiste de 66 ans s’est retiré de la vie politique française. Il a refusé de siéger au Conseil constitutionnel, une haute instance qui veille notamment à la régularité des élections et dont il est pourtant membre de droit. L’homme préfère écrire des livres ou présider une fondation, «La France s’engage». Mais François Hollande garde un oeil vif sur le monde et n’exclut pas tout retour sur la scène politique. Vous venez à Montreux au Swiss Economic Forum à un moment très particulier. Quel regard portez-vous sur la pandémie de coronavirus? Je porte un regard inquiet parce que nous avons connu une phase aiguë de cette crise au printemps, et nous avons le sentiment que nous n’en sortons pas complètement. Or le monde, l’économie ont besoin de stabilité et de certitude. Rien n’est pire que d’être dans l’ignorance sur le développement de ce virus, de sa pérennité, sur la possibilité ou non d’avoir un vaccin. Et rien n’est pire que de s’interroger sur les conséquences économiques durables ou non de la crise sanitaire. C’est pourquoi le devoir de tout responsable dans cette période est d’essayer de donner de la cohérence, de la visibilité et de la confiance. Une confiance nécessaire pour surmonter la peur qui nous gagne. Nous avons tendance à ne regarder que les chiffres qui grimpent, et à oublier que la situation est très différente de celle qui prévalait au printemps. Tant en Suisse qu’en France, le nombre de personnes touchées augmente, mais les cas d’hospitalisations restent très faibles. Ne sommes-nous pas en train de nous faire peur et d’oublier de prendre du recul? D’abord, nous disposons maintenant d’une expérience solide. Notre système hospitalier a fait beaucoup d’efforts, partout. Il est capable de faire face à des situations qui nous auraient valu hier de nous alarmer. Ensuite, nous avons fait beaucoup d’investissements dans la prévention, les masques, les tests. Enfin, le public est beaucoup plus averti qu’il ne l’était il y a six mois. C’est pourquoi, vous avez raison. Il y a à la fois une progression du nombre de personnes susceptibles d’être touchées par le virus, et il y en aura encore davantage avec la multiplication des tests. Mais il y a aussi le fait que notre système sanitaire peut faire face avec plus d’efficacité contre l’épidémie. Nous devons donc nous habituer à vivre dans un environnement où le virus va être là, sans qu’il ne nous menace sur le plan vital dès lors que nous prenons des précautions. Prenons un exemple. Le port du masque, qui hier paraissait discutable, aujourd’hui s’impose. Dès lors que les gestes barrières vont être généralisés, nous pouvons parfaitement vivre normalement et nous développer économiquement. Nous entrons dans une période «post-Covid» où nous allons être dans la précaution, dans la prudence, mais aussi dans la pleine activité. Vous évoquez les conséquences économiques de ces mesures sanitaires. La pandémie pose un défi aux gouvernements. Ils doivent prendre des mesures de santé publique, dont le coût économique est gigantesque. Se pose alors la question du prix de la vie. L’objectif, pour un gouvernant, est-il le zéro mort? Il y a eu un débat légitime sur le coût de la vie humaine. Est-ce que nous devons prendre des mesures qui infligent des dommages parfois irréversibles à l’économie pour sauver une vie? C’est un dilemme philosophique, mais pour le responsable politique, il doit décider avec l’idée qu’il n’y a pas de risque zéro! Nulle part. J’ai eu à affronter le terrorisme. J’ai dit à mes compatriotes, il n’y aura jamais de risque zéro face à ce fléau. Ce que nous avons à faire, c’est prendre les précautions nécessaires et faire en sorte que les citoyens soient le mieux possible informés et puissent adapter leur vie aux aléas de toute nature. Nous sommes dans un monde menaçant. Nous avons des matières chimiques qui peuvent exploser, comme nous l’avons vu au Liban. Nous sommes face à un réchauffement climatique qui multiplie la probabilité des catastrophes. Nous avons des industries qui peuvent à un moment connaître des mutations considérables. Nous devons minimiser le risque mais nous ne pouvons pas le supprimer. Tel est le rôle du politique. Ce n’est pas de faire peur, ni de tout interdire ou de tout arrêter. C’est de faire comprendre que, dans une société aussi vulnérable, nous devons adopter des comportements appropriés et rationnels. Un autre un défi se pose, celui entre les générations. Les personnes à risque sont les plus âgées. Mais leurs revenus sont garantis par leurs rentes, leur retraite. Tandis que les jeunes, les actifs doivent travailler... Oui, j’ai été frappé, pendant la période où le Covid était à son point maximal, par la réaction d’une génération, la mienne, qui n’acceptait pas d’être confinée si les autres retrouvaient leur liberté. Et pourtant, tous les éléments statistiques vont dans ce sens. Les plus fragiles, sont les plus de 65 ans. A partir de là, je pense qu’on ne peut pas traiter la population comme si elle était homogène, comme si elle était dans la même position face au virus. Il est donc légitime, et même nécessaire, que les actifs, ceux qui ont moins de 65 ans, puissent vivre pleinement et travailler, en adoptant des gestes barrière bien sûr. Et il est non moins légitime de demander aux autres de faire plus attention. Elargissons le champ des défis. Cette pandémie ne connaît aucune frontière et pose un formidable test à la gouvernance du monde. Pensez aux tensions entre la Chine et les Etats-Unis, à la course qui a eu lieu pour se procurer des masques et, maintenant, la guerre du vaccin qui couve. Comment éviter le chaos? Jamais le monde n’a été confronté à des conflits de cette importance. Certes nous avons connu la guerre froide, mais elle n’avait jamais dégénéré. Certes nous avons été confrontés au terrorisme islamiste certes nous avons traversé des crises économiques et financières, mais aujourd’hui tous ces conflits s’ajoutent les uns aux autres. Une confrontation majeure entre les Etats-Unis et la Chine tout d’abord. Elle n’est pas que commerciale. Regardons ce qui se produit actuellement à Hong Kong, peut-être demain à Taïwan. Le Moyen-Orient reste une poudrière. L’Est de l’Europe est sous la pression russe. Des contentieux se multiplient sur le plan économique. Les GAFA échappent aux règles fiscales. A partir de là, l’ordre international est en question. De ce point de vue, ce qui va se passer lors des élections américaines sera majeur. Allons-nous rentrer dans un processus où les conflits s’exacerbent, en cas de réélection de Donald Trump? Ou entrerons-nous dans une situation où les différends sans disparaitre, pourront être réglés par la négociation? Enfin, il y a la question climatique qui envahit à juste raison les esprits. On sait bien que l’on ne pourra pas demander à chacune et chacun d’entre nous de faire des efforts si nous avons le sentiment que le monde lui-même, n’est pas capable d’engager un processus durable de lutte contre le réchauffement. Dans ce moment historique, jamais nous n’avons eu autant besoin de l’Europe et jamais elle n’est apparue aussi absente. Nous allons revenir sur l’Europe dans un instant. Mais avant, continuons sur cette gouvernance mondiale. Vous serez à Montreux, qui se trouve près de Genève, ville hôte de nombreuses organisations internationales: celle de la santé (OMS), celle du commerce (OMC), l’ONU, etc. Ce système-là peut-il encore servir à quelque chose tant il semble paralysé par les tensions entre Etats? Il n’y a pas d’ordre international, sans qu’il y ait un avantage commun pour les pays qui y adhèrent. De la même manière, il n’y a pas d’organisation internationale qui puisse valoir s’il n’y a pas des sanctions en cas de non-respect des règles. Or le problème des institutions mondiales, c’est qu’elles sont aujourd’hui bloquées. A la fois par des financements qui ne sont pas suffisants pour qu’elles puissent jouer tout leur rôle. Bloquées aussi notamment par la Russie, la Chine et les Etats-Unis qui empêchent toutes recherche de règlement des conflits dans le cadre du droit international. Je ne suis pas un multilatéraliste naïf. Je me rends bien compte que si l’on veut dénouer le système, il faut que les Etats-Unis puissent retrouver confiance dans le multilatéralisme et que la Chine, qui bénéficie beaucoup de la mondialisation, puisse être mise devant ses responsabilités. Mais je crois aux organisations internationales parce que ce sont elles qui peuvent trouver les accords qui s’appliqueront ensuite partout dans le monde. C’est le rôle de l’Europe de porter cette conception du monde Notez que la Suisse peut aussi être motrice parce qu’elle a une conception active de la neutralité. Il est très important que les pays qui n’ont aucun intérêt de puissance puisse faire prévaloir le droit. Justement, l’Europe. La gestion de la crise sanitaire a conduit à une certaine action commune au plus fort de la pandémie, mais il lui fut ensuite difficile de s’entendre sur un plan d’action. Ne fut-ce pas une occasion manquée? L’Europe a réussi néanmoins à conclure un accord pour dégager des financements de manière novatrice, puisqu’il y aura une possibilité d’emprunt par l’Union européenne et ensuite des dons qui pourront être apportés aux pays les plus touchés par la crise. De ce point de vue, l’Europe a été à la hauteur. Hélas, comme toujours, et j’ai eu l’occasion de le vérifier lorsque j’étais président, l’Europe tarde à prendre les bonnes décisions. On va le voir d’ailleurs dans la lutte contre le ralentissement économique produit par le coronavirus. Le temps que les mesures soient effectives, la récession sera peut-être déjà derrière nous. La deuxième conclusion qu’il faut tirer est qu’à 27 pays membres cela devient très difficile de trouver un consensus. Non pas en raison du nombre, mais des intérêts qui ne sont plus les mêmes entre les différents Etats. Ce qui fait que l’on a parlé de pays frugaux et de pays dépensiers avec l’Allemagne comme arbitre principal. Mais on aurait aussi pu parler des pays du Sud, des pays du Nord, de l’Est comme si l’Europe était redevenue une mosaïque. C’est la raison pour laquelle je pense que s’il faut garder l’Europe à 27, je n’ai jamais voulu son éclatement, il faut maintenant prendre acte qu’il sera très difficile d’avancer dans ces conditions-là. Je suis donc favorable à ce qu’il y ait une Europe qui avance beaucoup plus vite, six ou sept pays qui ont envie d’aller beaucoup plus loin aussi bien sur le sujet des industries d’avenir que sur celui de la transition écologique et même sur la question de la défense du continent. Cela veut-il dire que vous ne réduisez pas ce cercle à celui de la monnaie, aux pays qui ont l’euro? La monnaie concerne des pays qui ont consenti à un transfert majeur de souveraineté. Mais la monnaie ne conduit pas nécessairement à une construction politique. Aujourd’hui, c’est la banque centrale qui gère la question des dettes et le niveau de l’euro. Dès lors que la zone euro est bien régulée par la BCE, même si à force de fournir des liquidités il peut y avoir des bulles qui explosent, ce qu’ont à faire les Etats, c’est bâtir l’Europe qui agira là où les nations ne s’affrontent pas. Notamment la transition écologique, les industries d’avenir, la sécurité. Pour le moment, ces pays vont devoir gérer une montagne de dettes qui s’ajoute à celle héritée de la crise de 2008. On a l’impression qu’elle sera impossible à rembourser... Le jour où l’on dira que la dette ne sera jamais remboursée, les prêteurs commenceront à s’interroger sur l’avantage qu’ils peuvent avoir à donner un argent précieux à des Etats impécunieux. Les responsables politiques doivent donc affirmer que la dette engage les générations futures. Cette dette sera-elle elle-même couverte à son terme par d’autres emprunts? C’est possible. Mais le principe, c’est que lorsque l’on emprunte, on doit rembourser. Je ne crois pas du tout à la fable d’un argent gratuit qui serait désormais à disposition de tous. Cette illusion conduirait à ce qu’il n’y ait plus de discipline, plus de régulation, plus de respect de valeur même de la monnaie. Cette fuite devant la réalité priverait le citoyen de toute compréhension des règles de finances publiques. Pourquoi d’ailleurs continuer à payer des impôts? Autant il est nécessaire, dans certains moments que les banques centrales fournissent des liquidités, autant la menace aujourd’hui, c’est que les spéculateurs, plus que les entrepreneurs, profitent de cet argent facile est que l’économie financière mange l’économie réelle. Regardons à plus long terme, comme le fera le Swiss Economic Forum. Quelles seront les traces durables que la pandémie laissera sur nos systèmes politiques, sur la démocratie versus les régimes autoritaires? Cette question se pose depuis que la démocratie existe. Aujourd’hui les démocraties courbent le dos alors qu’il y a vingt ans elles étaient en conquête. Hier, elles étaient exigeantes en matière de droits de l’Homme, elles pouvaient même être regardées comme impériales, on le leur reprochait. Mais désormais elles ont peur, elles fuient la force alors que les puissances non démocratiques n’ont peur de rien, et en tout cas pas de nous. Or il n’y a pas de démocratie s’il n’y a pas une volonté de la défendre. Ce sursaut relève des citoyens eux-mêmes: désirent-ils vraiment que leur modèle fondé sur la liberté puisse être regardé comme le meilleur? Nos Etats doivent se faire entendre. Si les démocraties sont faibles, les dictatures ont de sinistres jours devant elle. Cela rappelle ce que vous avez déjà dit. Durant votre course à l’Elysée, vous aviez un adversaire, la finance. Est-ce toujours le cas? Dans votre dernier livre, vous écrivez: «Le socialisme a désormais un ennemi principal, le plus dangereux qui soit […] l’extrême droite» caractérisée par son populisme. Nos ennemis peuvent quelques fois faire cause commune. Quand la finance devient spéculative et se détache des intérêts des peuples, elle engendre le populisme. Ce dernier a alors une cause facile, celle de défendre la souveraineté, l’identité face à un monde supposé être celui de l’argent. C’est pourquoi il est si important que les Etats retrouvent une capacité à agir. Non pas dans le nationalisme, mais tout simplement dans l’affirmation de leur pouvoir. Ce que les populistes espèrent, c’est qu’à un moment, faute d’avoir un Etat qui se fasse respecter, la «frontière» devienne la protection absolue et le souverainisme, la réponse peureuse à la globalisation. On l’a bien vu pendant la crise du Covid où des propos de circonstance ont pu être tenus appelant à tout relocaliser. Comme si c’était la mondialisation qui était la responsable de l’épidémie. Comme si les masques qui nous manquaient étaient bloqués par les Chinois. Le populisme sait utiliser toutes les failles, et il en existe beaucoup, dans la globalisation et notamment le sentiment d’impuissance des Etats face aux désordres de toutes sortes. Mais considérez-vous que le populisme est vraiment un danger très important pour les démocraties? Donald Trump est en train de faire la démonstration que le populisme peut conduire à des décisions absurdes. Et si son élection en 2016 a au moins un mérite, c’est celui de montrer ce qu’est le populisme lorsqu’il arrive au sommet de l’Etat le plus puissant du monde. Tant qu’il n’était qu’un discours, il pouvait par des raisonnements simplistes énoncer des positions frappées au sceau de l’évidence. La crise du Covid, aura révélé par les comportements et les attitudes de Trump, Bolsonaro et Boris Johnson le caractère dangereux du populisme dans sa façon de faire, son mode d’action et surtout ses conséquences pour les populations. Vous êtes retiré de la vie politique, mais pas publique. Vous êtes un auteur à succès («Les leçons du pouvoir», livre publié en 2018 vendu à plus de 150.000 exemplaires). Et vous présidez la Fondation «La France s’engage» qui compte d’importants soutiens privés (Total, Danone, Accenture, la famille Pinault et d’autres). Quel but souhaitez-vous atteindre avec cette fondation? Durant mon quinquennat, j’ai été frappé par la vitalité du monde associatif. On le regarde souvent comme un soutien aux plus démunis or il invente le monde de demain. Il innove dans ses pratiques comme dans ses finalités. Aujourd’hui, la frontière entre l’économie privée et l’économie sociale est devenue indistincte. Beaucoup de cadres qui ont fait de très beaux parcours dans la sphère marchande vont vers le service aux autres en mettant en valeur leur expérience technologique. Il m’importe d’apporter des fonds à ces entrepreneurs solidaires. Vous apportez des fonds, mais la fondation reste à but non lucratif... Il n’y a pas de recherche de profit, ce qui compte c’est l’utilité sociale, celle qui bénéficie à tous. Je salue les groupes privés qui se sont engagés à mes côtés, et qui ont compris que ce qui se dessinait là pouvait aussi les enrichir humainement. En juillet, le directeur de la rédaction et de la publication du quotidien Libération, Laurent Joffrin, a démissionné et publié un «appel à la recomposition de la gauche», signé par 130 personnalités. C’est un de vos proches. Prépare-t-il votre retour en politique? (sourire) Laurent Joffrin est un ami depuis quarante ans. Il a mené une carrière brillante comme journaliste indépendant. Aujourd’hui, l’initiative qu’il prend est courageuse pour que la gauche de gouvernement, la gauche sociale-démocrate, la gauche qui assume l’audace de vouloir diriger un grand pays comme la France puisse se reconstituer. Elle aura à agir avec les écologistes dans le cadre d’une alliance équilibrée. Mais avant qu’il y ait cette union faut-il encore qu’il y ait une pensée et une force centrale, et c’est ce à quoi Laurent Joffrin travaille. Cette démarche ne suffira pas. Il faudra que le Parti socialiste participe de cette refondation. Il n’y a pas de démocratie s’il n’y a pas une alternance entre le centre gauche et le centre droit, la gauche et la droite. Rien n’est pire que la confusion. C’est elle qui fait le jeu des populismes. Souhaitez-vous y jouer un rôle actif? Actif, je l’ai été déjà suffisamment. J’ai dirigé le Parti socialiste pendant 11 ans. Je ne vais pas me remettre à ce type de tâches, que je respecte profondément. Mais si je peux contribuer à cette refondation, j’y prendrai toute ma part. Je peux apporter mon expérience sans rien rechercher pour moi-même. Terminons par la Suisse, qui connaît avec la France une relation très spéciale. Historique bien sûr, mais toujours aujourd’hui. Le plus grand nombre de travailleurs frontaliers (plus de 170.000) vient de France. La plus grande communauté de Suisses à l’étranger se trouve en France (près de 200.00). Que pensez-vous de la Suisse? J’ai une relation particulière avec la Suisse d’abord parce que mes parents y passaient régulièrement leurs vacances. Enfant, j’allais à Ouchy faire de la barque sur le lac Léman. Comme président de la République, j’ai eu à coeur de régler un certain nombre de difficultés entre la Suisse et la France. Vous évoquez les travailleurs frontaliers. Je remercie la Suisse de leur faire bon accueil, eux-mêmes y donnent le meilleur de leur talent pour servir nos deux pays. J’ai réglé l’avenir de l’aéroport Bâle-Mulhouse. Mais plus personnellement j’ai une très grande considération pour la capacité technologique de la Suisse. On parle toujours de la Suisse en tant que pays de la banque, et on a raison, mais la Suisse est aussi un grand pays industriel avec lequel la France doit absolument travailler. Enfin, j’ai évoqué la neutralité active de la Suisse. Sa diplomatie peut être utile pour régler un certain nombre de différends. Pour toutes ces raisons, je m’honore d’avoir été un président qui a défini nos relations, comme exceptionnelles. A Montreux, vous connaissez sûrement le Montreux Jazz Festival. Quelle est pour vous la chanson du moment? (bref silence) Une chanson française, forcément. J’ai été peiné par la mort de Christophe pendant le confinement. C’était un grand chanteur francophone. «Les mots bleus» et «Les paradis perdus», ce sont deux chansons qui peuvent s’adapter à la période que nous traversons. Le paradis n’est jamais complètement perdu. Il existe encore, mais il faut y travailler pour y accéder un jour. Et les mots bleus c’est la bonne manière de parler de l’espoir qui nous anime. >>Lire aussi: Swiss Economic Forum: deux jours, 900 décideurs