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Une victoire démocrate serait favorable aux banques suisses et supportable pour la pharma

Economistes et stratèges ont fait leurs prévisions. L’élection de Joe Biden profiterait aux valeurs cycliques. Un succès de Donald Trump soutiendrait l’ensemble du marché boursier.

Après un premier débat particulièrement chaotique, le second s’est déroulé de manière plus posée grâce à des temps de parole limités. (Keystone)
Après un premier débat particulièrement chaotique, le second s’est déroulé de manière plus posée grâce à des temps de parole limités. (Keystone)
29 octobre 2020, 19h17
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L’identité du futur locataire de la Maison blanche occupe les esprits des investisseurs. Parce qu’elle devrait immanquablement donner lieu à un repositionnement de leurs portefeuilles, quel que soit le résultat du scrutin. Leur regard se portera aussi sur l’élection du Congrès (Sénat et Chambre des Représentants), institution avec laquelle Joe Biden ou Donald Trump devra composer pour mettre en œuvre les réformes envisagées. Les opérateurs ont d’ores et déjà intégré l’élection de Joe Biden le 3 novembre. Ainsi qu’une reconquête du Sénat par les Démocrates, déjà majoritaires à la Chambre des représentants. C’est du moins l’avis exprimés jeudi par les spécialistes de la banque Edmond de Rothschild. Lors d’une conférence en ligne, ils ont présenté trois scénarios. Dans le premier cas, la victoire démocrate est totale. Joe Biden devient élu président avec un Congrès démocrate. Cela se traduirait par «une surperformance, plutôt modérée, des valeurs cycliques grâce aux mesures de relance budgétaire et aux anticipations inflationnistes», selon Christophe Foliot, co-directeur de la Gestion Actions chez Edmond de Rothschild. Le deuxième scénario voit l’élection de Joe Biden dans un Congrès divisé (l’une des deux chambres est démocrate, l’autre républicaine). Ce cas serait le moins favorable aux marchés, car la relance budgétaire pourrait mettre du temps à être votée. Enfin le troisième scénario, correspondant au statu quo de la situation actuelle - Donald Trump reste président avec un Congrès divisé. Cette option serait le plus apprécié par le marché qu’il contribuerait à orienter vers une phase haussière.

Banques en mesure de tirer parti d’un succès démocrate

Certains stratèges et analystes s’écartent de l’idée selon laquelle une victoire de Joe Biden constituerait un obstacle pour les actions – le candidat souhaite en effet faire passer l’impôt sur les sociétés de 21% à 28% - ce qui mettrait potentiellement en difficulté les valeurs financières. De manière surprenante, Joe Biden pourrait ainsi soutenir le secteur bancaire s’il met en œuvre les plans annoncés durant sa campagne, car les taux d’emprunt à long terme de l’Etat fédéral pourraient remonter, tandis que les taux courts devraient rester durablement bas, grâce à l’intervention de la Réserve fédérale. Or ce différentiel de taux est de nature à soutenir la rentabilité des banques. Dans le cas d’une victoire de Joe Biden assortie d’un congrès divisé, le risque de changement réglementaire est jugé faible par le spécialiste et pourrait même être vu comme relativement positif pour les titres bancaires, d’autant que ceux-ci se sont dépréciés ces derniers temps. Dans le cas d’un statu quo, le secteur bancaire pourrait ressortir gagnant après les élections, en faisant abstraction de l’impact de la pandémie de covid. Comment les banques suisses disposant d’importantes unités d’affaires aux Etats-Unis, UBS et Credit Suisse en particulier seraient-elles affectées? Responsable de la recherche Actions chez Julius Baer, Patrik Lang souligne lui aussi l’impact tendanciellement négatif des réformes sous une présidence démocrate, pour l’évolution des bénéfices des banques. Ces effets devraient cependant, à son gré, être plus que compensés par les répercussions positives, sur la conjoncture, d’une politique budgétaire très active et, avant tout, d’une courbe des taux plus pentue. Il estime même qu’au final, les banques suisses devraient plutôt tirer profit d’une victoire démocrate.

Le secteur de la santé favorisé par une réélection de Trump

Deuxième secteur important pour les valeurs suisses, celui de la santé, avec ses valeurs phares Roche et Novartis en particulier. Selon Adeline Salat-Baroux, spécialiste du secteur et Gérante Actions internationales chez Edmond de Rothschild, une victoire de Donald Trump se traduirait par une moindre pression sur le prix des médicaments, compte tenu de son discours plus favorable à ce secteur. Plus encore depuis la pandémie, à la faveur des collaborations nouées par les agences fédérales et les Etats pour accélérer la mise au point de vaccins. La spécialiste souligne au passage la valorisation actuellement très faible de cette industrie, notamment en raison de la réthorique assez négative sur l’évolution du prix des médicaments durant les années électorales. La réforme du prix des médicaments doit réunir une très large majorité pour aboutir. Cependant, même en cas de négociation défavorable, son impact serait de toute façon assez limité car il ne toucherait que 10% du chiffre d’affaires des grands laboratoires, selon Adeline Salat-Baroux. «Donc assez peu de risque de ce côté-là», estime-t-elle. Peu de changements sont en outre attendus en cas de victoire de Joe Biden avec un congrès divisé. En cas d’élection de Joe Biden, Patrik Lang s’attend à une continuation de la politique de Barack Obama, ce qui devrait se traduire par une pression sur les prix plus forte qui affecterait aussi l’industrie pharmaceutique suisse. Le spécialiste anticipe toutefois une approche modérée et non pas abrupte qui, dans l’ensemble, devrait rendre ces réformes supportables.

Consommation résiliente

Enfin, une victoire totale des démocrates n’en déploierait pas moins un effet légèrement favorable sur le secteur de la consommation, avance Adeline Salat-Baroux, du fait de l’ampleur du plan de relance budgétaire et malgré la pression sur les marges induite par une hausse des salaires. Si Donald Trump est réélu avec un Congrès divisé (statu quo), l’environnement, du fait des barrières tarifaires, ne serait en revanche pas très favorable au secteur. Mais pour la spécialiste, plus que le résultat de l’élection, l’élément clé pour la consommation devrait plutôt dépendre de l’évolution de la pandémie et d’un éventuel re-confinement.

>>Lire aussi: L'éditorial de Frédéric Lelièvre: Donald Trump ou Joe Biden, qu'importe!