Sophie Marenne
L'Agefi - Journaliste
10 novembre 2020, 17h10
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Ni Donald Trump, ni Joe Biden ne se sont embarqués sur le terrain de l’exploration spatiale durant la course à la présidence. Un symbole du désintérêt des États-Unis pour ce secteur? Loin de là, répondent les acteurs de l’industrie en Suisse. «Le budget spatial n’a d’ailleurs jamais été aussi important que lors du mandat de Trump», souligne Aude Pugin, CEO d’Apco Technologies, entreprise vaudoise fabriquant des pièces de lanceurs. L’agence spatiale américaine (NASA) s’est vu attribuer 21 milliards de dollars en 2020: un investissement ambitieux qui, en tenant compte de l’inflation, n’avait pas été atteint depuis 1970. «Les Etats-Unis sont plus que jamais actifs dans le déploiement de nouvelles capacités de lancement et de mise en orbite», renchérit Fabien Jordan dont la jeune société de Chavannes-près-Renens, Astrocast, vise la création d’une constellation de nanosatellites.
Le rêve qui a pris forme sous l’administration Trump est celui un retour de l’Homme – et surtout d’une première femme – sur la lune via le programme Artemis. Durant ces quatre ans, les Etats-Unis ont aussi travaillé au renforcement de leur domination sur le cosmos à coup de partenariats public-privé à l’image du vol commercial de Crew Dragon de Space X qui décollera vers la Station spatiale internationale (ISS) le 14 novembre. Autre accomplissement sous la houlette républicaine: la création de la US Space Force, une branche militaire dédiée à l’espace.
De plus, la stratégie du natif de Pennsylvanie augure un renforcement des collaborations internationales. Pour Olivier Henin, qui est également président du Swiss Space Industries Group (SSIG), le protectionnisme prôné par Donald Trump a eu tendance à créer des silos: les Américains, les Chinois, les Russes et les Européens travaillant chacun pour soi. «Le futur offre une plus grande probabilité de coopération entre les grandes agences», avance-t-il. De nouvelles alliances pourraient notamment se tisser autour de la mission Artemis à laquelle les agences spatiales canadienne, japonaise et européenne – et par conséquent la Suisse – contribueront.
Lire aussi: La galaxie spatiale suisse croît à grande vitesse
Le rêve qui a pris forme sous l’administration Trump est celui un retour de l’Homme – et surtout d’une première femme – sur la lune via le programme Artemis. Durant ces quatre ans, les Etats-Unis ont aussi travaillé au renforcement de leur domination sur le cosmos à coup de partenariats public-privé à l’image du vol commercial de Crew Dragon de Space X qui décollera vers la Station spatiale internationale (ISS) le 14 novembre. Autre accomplissement sous la houlette républicaine: la création de la US Space Force, une branche militaire dédiée à l’espace.
Collaboratif et tourné vers la Terre
Joe Biden conservera-t-il une continuité avec la stratégie spatiale de son prédécesseur? «Comme il n'a pas encore officiellement publié ses principales initiatives spatiales, il est trop tôt pour spéculer», avertit Luis de Leon Chardel, CEO de Ruag Space, filiale du groupe d'aéronautique et de défense. Seule certitude: le Parti démocrate affirme qu’il continuera à soutenir la NASA sur la voie lunaire, puis martienne. Un changement de cap point néanmoins à l’horizon. Une meilleure compréhension de «l'impact du changement climatique sur notre planète» deviendra une priorité, selon les mots d’un article publié sur la plateforme du parti. Joe Biden voudrait donc ramener l’attention de la NASA vers la Terre et son observation. «Cette impulsion semble inévitable pour satisfaire la part écolo de son électorat», argue Olivier Henin, patron de la société neuchâteloise Syderal Swiss qui produit des équipements électroniques pour satellite. «C’est une excellent chose», complète Fabien Jordan car, l’ingénieur l’assure: «Même si le monde entier se passionne pour l’exploration spatiale, utiliser nos ressources pour améliorer la situation sur Terre avant de coloniser la Lune et Mars est loin d’être absurde.»De plus, la stratégie du natif de Pennsylvanie augure un renforcement des collaborations internationales. Pour Olivier Henin, qui est également président du Swiss Space Industries Group (SSIG), le protectionnisme prôné par Donald Trump a eu tendance à créer des silos: les Américains, les Chinois, les Russes et les Européens travaillant chacun pour soi. «Le futur offre une plus grande probabilité de coopération entre les grandes agences», avance-t-il. De nouvelles alliances pourraient notamment se tisser autour de la mission Artemis à laquelle les agences spatiales canadienne, japonaise et européenne – et par conséquent la Suisse – contribueront.
Faire la course en tête
Les États-Unis restent et resteront le plus grand acteur spatial, «quel que soit le président, appuie Luis de Leon Chardel. Ils représentent environ deux tiers du marché mondial. Cinq fois plus que ce que l'Europe dépense. La Chine, le Japon, la Russie ainsi que l'Inde ne représentent, ensemble, que les 20% restant.» Pour pouvoir prétendre à les concurrencer, les pays d’Europe – et la Suisse – doivent «continuer à unir leurs forces, tant sur le segment institutionnel que commercial», ajoute Aude Pugin. D’où l’importance de maintenir les budgets d’aide à l’innovation. Le président de la faitière du domaine astral Olivier Henin insiste: «C’est maintenant qu’il nous faut investir afin d’être prêts technologiquement lors du redémarrage des marchés.»Toujours plus d’entreprises suisses en orbite
Les acteurs de l’économie et de la recherche spatiales suisses étaient réunis ces 9 et 10 novembre, lors du congrès virtuel Swiss Space Days 2020, organisé par le Swiss Space Office, la division des affaires spatiales du Secrétariat d'Etat à la formation, à la recherche et à l'innovation (SEFRI). Au total, 240 représentants d’entreprises helvétiques, de grands intégrateurs européens et de l’Agence spatiale européenne (ESA) ont discuté des défis auxquels ils sont confrontés. Sur le territoire national, une centaine de sociétés sont actives sur ce segment, pour un total de 2500 à 3000 emplois. Ce nombre sera amené à augmenter, selon Renato Krpoun, chef de la division des affaires spatiales du SEFRI. «A l’image de Bcomp à Fribourg dont la technologie de composites aux fibres naturelles est en train de se qualifier pour des vols spatiaux, les entreprises ont de plus en plus d’intérêt pour le champ des applications spatiales.» Le directeur du Swiss Space Office souligne aussi que le Business Incubation Centre (BIC) de l’ESA, installé à Zurich, a déjà accueilli 40 jeunes pousses depuis 2016. Les technologies spatiales ont acquis une importance stratégique pour le pays. «Reste à espérer que la crise de la Covid-19 n’aura pas d’impact sur le budget de la participation de la Suisse aux activités de l’ESA», espère Olivier Henin, président de la faîtière Swiss Space Industries Group (SSIG). Rien n’est encore fixé mais il se murmure que le budget pour les quatre prochaines années, de 2021 à 2024, serait en hausse de 2%: un signe encourageant pour le secteur.Lire aussi: La galaxie spatiale suisse croît à grande vitesse