Pas d’immenses allées bourdonnantes sillonnées par 175.000 visiteurs internationaux à Las Vegas. Du 11 au 14 janvier, le Consumer Electronics Show (CES) présentera les dernières innovations mondiales en ligne. Et les milliers d’exposants dont au moins une trentaine d’entreprises suisses feront la promotion de leurs produits depuis leur salon.
«L'atmosphère pétillante et vivante qui caractérise habituellement le CES nous manquera, c’est sûr», décrit Janine van Stiphout, responsable marketing et communication chez Embotech. Coaché depuis décembre par BMW, ce spin-off de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) crée des logiciels de décision en temps réel pour les véhicules autonomes. Janine van Stiphout espère surtout que la plateforme virtuelle mise en place fonctionnera «tout au long de l'événement et sans problème».
Épargne et confort
Chez les entrepreneurs suisses, un certain pragmatisme règne. «Le contact personnel est irremplaçable, mais un événement en ligne vaut toujours mieux qu’aucun événement», témoigne Tomas Sluka, CEO et cofondateur de Creal. Et d’ajouter que «c’est plus confortable logistiquement. Et moins cher.» Née à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), sa start-up met au point des lunettes de réalité virtuelle (VR) anti-nausée.
L’ingénieur et la moitié de son équipe d’une vingtaine d’employés devaient pourtant se rendre sur place. Ils ont perdu leurs frais de logement car «c’était une bonne affaire: une promotion early-bird non remboursable», précise-t-il. Philosophe, Tomas Sluka juge que cette perte «n’est pas si dramatique» au regard du montant moyen à débourser pour un hébergement sur place à cette période.
Passer virtuellement par Las Vegas représente cette année «une façon d’explorer le marché à moindre coût», renchérit Gaetan Vannay, cofondateur de Securaxis. La start-up genevoise commercialise une solution d’analyse et de monitorage sonore destinée aux villes. Après l’avoir déployée à Fribourg, Londres, Paris et bientôt Luxembourg et Porto, la jeune entreprise compte profiter du CES pour «tâter le marché nord-américain», selon les mots du chef d’équipe. Une partie du staff de Securaxis aurait-elle tout de même participé à un CES en présence physique? Gaetan Vannay le suppose: «Le côté numérique a facilité notre choix, mais ce n’était pas l’argument décisif.»

Proactivité et fatigue numérique
Disposer d’un stand virtuel ne garantit pas pour autant les clics des visiteurs. Gaetan Vannay prévient: «Etre simplement exposant lors d’une foire en ligne, cela ne fonctionne pas». Pour drainer de l’exposition, il conseille aux entrepreneurs de s’investir en étant sponsor ou en donnant une conférence et d’ainsi «réallouer les budgets logistiques à la communication et aux partenariats». Sur le CES néanmoins, Securaxis ne fera rien de tel car «une promotion dynamique est assurée par SwissTech, la campagne de Présence Suisse», dit-il.
Figure de proue de ce pavillon helvétique, l’ambassadeur Nicolas Bideau explique: «Si nous sentions une forme de fatigue digitale ces derniers mois, les inscriptions ont montré que les start-up étaient toujours au rendez-vous!» La participation qui leur est demandée – tombant de 7000 à 500 francs pour l’option d’entrée – y est peut-être pour quelque chose. Sans charge de construction ou de personnel sur place, l’organisation Switzerland Global Enterprise (S-GE) a facturé pour ce forfait l’équivalent de ce que le CES exige pour une page sur son portail. Les prestations de communication et de coaching sont offertes par les partenaires de SwissTech.
Cette année, 23 entreprises embarqueront sous les couleurs du drapeau rouge à croix blanche dont Securaxis, Creal ou encore AVAtronics. Le directeur technique de cette dernière, Amir Farahani, juge «la planification et la coordination des agences suisses» comme «précises, ciblées et fructueuses». Mais le cofondateur de cette société qui vise à supprimer tout bruit parasite pour le marché audio ou automobile souligne: «Nous n'avons toujours aucune idée de la manière précise dont l'exposition se déroulera en ligne la semaine prochaine».
L’enthousiasme est donc là mais «différent», selon les mots du chef de Présence Suisse, Nicolas Bideau. Ce dernier reconnaît que bien que «la conviction de l’utilité de ces plateformes demeure forte», à terme «la plupart des start-up se réjouissent de revenir à des manifestations physiques.» Janine van Stiphout d’Embotech indique pour sa part: «Nous attendons avec impatience le moment où nous pourrons réellement revenir à Las Vegas»