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Le boom du e-commerce révèle les lacunes numériques des entreprises suisses

Si la pandémie a accéléré la pratique du commerce en ligne, elle a surtout mis le doigt sur le retard des entreprises suisses dans ce secteur.

Les ventes en ligne devraient grimper de 40% en 2020.
(Keystone)
Les ventes en ligne devraient grimper de 40% en 2020.
05 décembre 2020, 8h30
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Faire ses achats de Noël en ligne? En Suisse la tendance est de plus en plus marquée. D’après les résultats du récent sondage réalisé par l’institut GfK, 32% des Suisses interrogées déclarent vouloir acheter principalement leur cadeau de fin d’année sur le web, contre 30% pour ceux qui les feront essentiellement en magasin. Preuve de cette demande, quelque 130 millions de francs auraient été dépensés sur internet en Suisse le vendredi 27 novembre dernier soit une progression de 30% sur un an, selon le site blackfriday.ch, qui référence les offres en ligne des commerçants helvétiques depuis 2016. Quant à la Poste Suisse, elle a distribué 7,3 millions de colis au cours de la semaine du Black Friday et du Cyber Monday, soit près de 25% de plus que toute l’année 2019. Un record aussi pour l’entreprise. 

En coulisses, les sociétés se préparent pour le sprint final. La filiale de vente par correspondance de Migros, Digitec Galaxus s'attend par exemple à recevoir au moins 50 % de commandes en plus dans les semaines précédant Noël qu'à la même période l'année dernière, a-t-elle communiqué vendredi.

Une accélération, pas une révolution

Face à cette hausse, Nicolas Inglard préfère tempérer l’enthousiasme régnant dans le secteur. Pour le directeur du cabinet genevois d’analyse Imadeo, avec ou sans coronavirus, les achats sur Internet ont le vent en poupe dans le pays depuis déjà quinze ans. Une tendance que «la pandémie a tout simplement accélérée», estime-t-il. «De manière générale, la pandémie a certainement pour effet d'augmenter la consommation. Au lieu de dépenser notre argent pour des vacances, des concerts ou pour aller au restaurant, nous le dépensons pour des choses qui rendent notre quotidien plus agréable: un canapé confortable, une nouvelle console de jeu ou une machine à café pour le télétravail

L'an dernier, les Suisses ont fait des achats en ligne pour un montant total d’environ 10 milliards de francs, soit une augmentation de 8% du volume du commerce en ligne par rapport à 2019?. Pour cette année, les experts tablent sur une hausse de 40%. 


Nicolas Inglard rappelle toutefois que la proportion des achats en ligne représente une petite partie du chiffre d'affaires du commerce de détail en Suisse, «qui s’élève lui à plus de 90 milliards de francs». 

Les Suisses achètent à l’étranger

Pour le spécialiste, la pandémie a certes accéléré la pratique du commerce en ligne, mais elle a surtout mis le doigt sur le retard des entreprises suisses. «Si les petits commerçants n’étaient clairement pas préparés pour la vente en ligne, les grands groupes se sont retrouvés quant à eux mal préparés, car ils n’ont pas investi suffisamment dans leur offre numérique. Ils essayent aujourd’hui de rattraper  les purs acteurs du commerce en ligne».


La transition est d’autant plus urgente que les difficultés des détaillants datent de bien avant la crise sanitaire. Dans son étude annuelle consacrée à la branche en Suisse, Credit Suisse indiquait début janvier que les revenus des acteurs helvétiques ont globalement stagné l’an passé. Une tendance qui perdure depuis plusieurs années. Et si la part de ceux qui font leurs achats en ligne augmente, l’allemand Zalando s’arroge toujours un cinquième des ventes sur internet.


Selon une récente enquête de NetComm Suisse, 40% des Suisses ont déclaré vouloir consommer localement sur le web. Or, il s’avère que les achats se font plutôt sur des sites étrangers, en Allemagne, en France et en Chine. Pour Carlo Terreni, directeur de cette association de promotion du commerce électronique, l’offre ne répond pas à la demande. «Avant la crise, les chiffres étaient édifiants: seuls 3 à 4% des PME suisses avaient un site d’e-commerce. C’est un vrai problème politique. Il faut que les autorités se mobilisent pour définir une réelle stratégie numérique dédiée aux petites et moyennes entreprises du pays. La Suisse ne peut pas se permettre d’être à la traîne sur ce segment en 2020.»