L’édition 2020 d’Investora Zürich s’est déroulée mercredi et jeudi dans des conditions plus difficiles en raison du coronavirus. Cependant, cela n’a pas enlevé l’intérêt que portent les investisseurs institutionnels et privés aux petites et moyennes capitalisations du marché suisse des actions. Cette tendance ressort clairement. L’affluence s’est avérée comparable à celle des exercices précédents, malgré une limitation à 300 participants par jour cette année.
Cette conférence, dont L’Agefi est partenaire, demeure un vivier à idées tout en procurant une vue assez large sur l’état actuel de l’industrie, des sociétés de services et immobilières suisses. A fortiori dans les circonstances exceptionnelles dues à la pandémie de Covid-19 qui s’est répercutée négativement sur la grande majorité des entreprises.
« Investora permet chaque année de mieux comprendre les avantages technologiques et/ou en coûts de telle ou telle entreprise dans tel ou tel secteur et d’en saisir le potentiel ou non de création de valeur », souligne Marc Possa, associé de VV Vermögensverwaltung à Zoug et gérant du fonds SaraSelect.
Robustesse dans l’ensemble, le cas Meyer Burger
Dans l’ensemble, les signes d’une reprise des affaires se dessinent, sur fond de numérisation accentuée, bien que la situation reste fragile. Les perspectives s’avèrent intéressantes, en particulier pour Belimo (chef de file mondial en matière d’appareils de terrain pour la commande et la régulation des systèmes de chauffage, ventilation et climatisation), Swissquote (leader suisse dans le domaine des services financiers et du trading en ligne) ou Orell Füssli (impression et sécurité numérique).
On observe une robustesse des sociétés qui se sont présentées, mais avec plusieurs cas de restructuration et redressement qui ne sont pas encore gagnés. Spécialement Meyer Burger, qui a pu se recapitaliser mais doit encore monétiser son avantage technologique dans la photovoltaïque, après des années de disette. Le risque paraît, à ce stade, moins élevé pour Rieter, le leader mondial des systèmes de filage de fibres, ou Meier Tobler (avec son nouveau CEO Roger Basler présent jeudi) dans le domaine de la technique du bâtiment (distribution, systèmes et service).
Gunter Erfurt, le CEO de Meyer Burger, a démontré avec persuasion le potentiel que signifie la conversion d’un fournisseur de machines pour la fabrication industrielle des cellules et panneaux solaires en un producteur lui-même de modules photovoltaïques. De passer à un modèle d’affaires « captif » qui est le seul pouvant permettre au groupe basé à Thoune de faire valoir son avantage technologique dans l’industrie solaire et de restaurer une rentabilité attractive après une longue traversée du désert ponctuée de quatre augmentations de capital.
Tout en gardant ses machines pour lui-même, en protégeant son savoir-faire et sa technologie. Meyer Burger se trouve dans une position concurrentielle difficilement attaquable avec sa technologie (HJT/SWCT), développée en collaboration avec le CSEM (Centre suisse d’électronique et de microtechnique).
Ce positionnement est le seul susceptible de générer des marges élevées, et ainsi de battre des concurrents comme Panasonic, Sunpower ou LG qui ont des coûts de fabrication plus hauts que ceux de Meyer Burger. D’autre part, les fabricants utilisant la technologie PERC (entre autres Longi, JA Solar et QCells) ne peuvent offrir aucun panneau dans le segment premium. Meyer Burger vise une marge brute et une marge EBITDA (résultat brut d’exploitation) respectives de 45% à 50% et de 25% à 30% pour un chiffre d’affaires de 400 à 450 millions de francs d’ici 3 ans.
Un pari
Meyer Burger, venue aussi séduire l’auditoire, représente un pari osé au même titre que pour les sociétés biotechnologiques et biopharmaceutiques, dont Addex Therapeutics, Newron Pharmaceuticals, Cosmo Pharmaceuticals et Cassiopea qui ont tenu une présentation. Toutes ces entreprises nécessitent une conviction et une approche à long terme d’investissement. On ne peut pas les juger sur une base spéculative ou dans l’optique des trois à six prochains mois. C’est un autre enseignement que l’on peut tirer d’Investora.