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Un vote extrêmement dangereux pour deux raisons

ÉDITORIAL - L'initiative "pour une immigration modérée" est trompeuse et fait courir de grands risques à la Suisse. Pourtant, des solutions aux problèmes actuels sont à portée de main.

08 septembre 2020, 19h35
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La journée s’annonce historique. Et pour une fois ce qualificatif n’est pas galvaudé. Car le 27 septembre, la décision du peuple d’accepter ou non l’initiative «pour une immigration modérée» aura des conséquences qui iront bien au-delà du seul débat sur les étrangers, frontaliers ou résidents, en Suisse.
Appelons un chat un chat : l’initiative dite de limitation pose en réalité la question de la relation entre la Suisse et l’Union européenne (UE). En cas de oui, la dénonciation prévisible de l’accord sur la libre-circulation des personnes entrainera la fin des autres accords patiemment négociés dans ce que l’on appelle la voie bilatérale. Des accords, aujourd’hui enviés par la Grande-Bretagne, qui permettent à la Suisse de jouer sa partition dans le concert européen, le plus grand marché intégré du monde.
Imaginer, comme le font les initiants, que Berne pourra renégocier rapidement avec Bruxelles ce qu’il a fallu des années à construire relève au mieux d’un déni de réalité. Dans les relations entre Etats, il n’y a pas d’amis mais seulement des intérêts. En ces temps de Brexit, de tensions avec les Etats-Unis, la Chine ou la Russie, et de récession majeure en raison du coronavirus, l’UE sera très dure en affaires. Il apparaît donc extrêmement aventureux, et même dangereux, d’ouvrir un front contre elle en dénonçant les accords actuels.
Le jeu est aussi risqué pour une économie si dépendante du commerce international parce les discussions avec ses autres partenaires piétinent. Prenez la Chine : la mise à jour de l’accord de libre-échange est au point mort depuis trois ans. Ou les Etats-Unis : les discussions pour conclure un tel accord n’ont toujours pas commencé, car la Suisse n’est pas une priorité.
Il existe cependant une seconde raison pour laquelle l’initiative du 27 septembre est dangereuse. Nul ne dit que les accords bilatéraux ont permis à l’économie suisse de se développer en toute harmonie. Mais les problèmes de cherté des logements ou d’engorgement des infrastructures routières appellent d’autres solutions que la stigmatisation des étrangers. Il en va de même avec les tensions sur le marché du travail. La promotion des femmes, souvent mieux diplômées que les hommes au sortir des études, apparaît ainsi comme une réponse évidente mais pourtant guère soutenue par les initiants.
A l’heure où le populisme gagne la planète et fait des ravages au sein des populations, espérons que le génie suisse, mélange de compromis et de pragmatisme, continuera d’opérer.