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La hausse des émissions de CO2 et le rôle de la mode

L’habillement est un secteur dont les gaz à effet de serre peuvent difficilement être réduits. Mais il est tout de même possible d'agir. Par Marie Owens Thomsen

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«On observe une hausse de 60% des habits achetés dans le monde entre 2000 et 2014, et le temps que ces habits sont gardés a baissé de 50%.»

L’Agence internationale de l’énergie vient de publier l’estimation des émissions de CO2 en 2022. Elles enregistrent un niveau record avec 36,8 milliards de tonnes. Malgré ce nouveau record, il y a une bonne nouvelle: la hausse ne représente que 0,9% par rapport à 2021, bien inférieure au taux de croissance économique dans le monde de 3,2% en 2022. Autre fait également positif, la production d’énergie solaire et éolienne a marqué un record sur l’année.

Néanmoins, la transition vers une économie durable reste encore poussive, notamment à cause de notre dépendance à l’énergie fossile qui représente environ 75% de toutes les émissions dans le monde. Les transports génèrent 23% de ce total. La route en représente la vaste majorité tandis que les transports aérien et maritime se partagent à parts égales environ 5%.

Il peut paraître surprenant que l’industrie de la mode, du textile aux chaussures, soit responsable de 8% des émissions de CO2, selon la Commission économique des Nations unies pour l’Europe (CEE-ONU), plus que les secteurs aériens et maritimes réunis.

L’habillement est un secteur dont les émissions peuvent difficilement être réduites. Il faut savoir que seulement 1% des habits récupérés sont recyclés, et 99% sont incinérés. Typiquement, les vêtements qui sont produits avec des matériaux recyclés sont faits avec des bouteilles en plastique, et non pas du textile récupéré. Un frein au recyclage des textiles est le tri, qui normalement est fait à la main. Ensuite, il est difficile de séparer les composants des textiles qui mélangent par exemple du coton et polyester, et tout colorant doit être éliminé avant réutilisation. En outre, le processus de déchiquetage des textiles raccourcit les fibres, ce qui fait que le produit fini est davantage utilisé comme matériaux isolants, entre autres, plutôt que pour fabriquer des nouveaux habits.

Les textiles sont problématiques pour l’environnement également à cause de la consommation en eau nécessaire à leur fabrication
Marie Owens Thomsen

Les textiles sont problématiques pour l’environnement également à cause de la pollution et la consommation en eau nécessaire à leur fabrication. Les colorants et des traitements chimiques sont appliqués dans des bacs d’eau qui risquent d’infiltrer les rivières. Selon le Parlement européen, faire tourner une machine à laver remplie de polyester une seule fois peut libérer 700.000 fibres de microplastiques qui peuvent finir dans notre chaîne alimentaire. En Inde, 112 millions litres d’eau sont utilisés dans l’industrie du textile quotidiennement. Il en faut 20.000 pour produire un t-shirt en coton et un jean. On comprend alors que nous soyons encore très loin de la durabilité dans le secteur de la mode.

En attendant, il faudrait que nos habitudes changent. On observe une hausse de 60% des habits achetés dans le monde entre 2000 et 2014, et le temps que ces habits sont gardés a baissé de 50% – une conséquence directe de la tendance de la «fast fashion». Garder les vêtements plus longtemps, et les proposer d’occasion au lieu de les donner pour qu’ils finissent incinérés contribuerait à réduire le problème.

Le choix de matériaux doit aussi évoluer. Parmi les meilleures solutions sur le marché sont le coton et la laine recyclée, le lin et le chanvre organique, le Tencel (fait à partir de pâte de bois), ou encore le Bananatex – le premier textile du monde fabriqué entièrement de bananiers cultivés durablement. Ce dernier est une marque suisse certifiée «Cradle to Cradle» (de berceau à berceau) – chose utile pour orienter les consommateurs car la durabilité est à court de standards et de normes.

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Marie Owens Thomsen

Iata Economiste en chef